Bourgogne-Franche-Comté, Yonne (89)
Villethierry, Église Saint-Loup
Édifice
Le village de Villethierry, cité sous le nom de Villa Theodorici, au IXe s., relevait de l’archevêché de Sens. D’après la tradition, ce nom viendrait du roi de Bourgogne Thierry qui, soutenu par Théodebert, roi d’Austrasie, livra bataille en 599 à Clotaire II, roi de Soissons.
L’église, consacrée à saint Loup, est composée d’une nef flanquée d’un collatéral du côté sud, et d’une chapelle sud formant bras de transept, puis d’un chœur semi-circulaire. Sa structure est en grande partie romane et l’on peut facilement retrouver l’édifice primitif construit vraisemblablement dans la deuxième moitié du XIIe siècle : vaisseau unique de la nef, éclairé par trois petites fenêtres en plein cintre, celles du mur nord seules sont visibles, puis une travée droite aveugle et une abside semi-circulaire, percée de cinq baies étroites en plein cintre. Le portail de la façade occidentale fait partie de la première campagne : malgré de nombreuses reprises en briques, il reste deux chapiteaux, l’un à feuilles d’acanthes, l’autre sculpté de rinceaux perlés, et surtout au tympan sous un arc trilobé, un évêque portant mitre et crosse (saint Loup vraisemblablement) entre deux anges thuriféraires. Ce beau morceau de sculpture d’esprit roman, taillé dans une pierre calcaire, a été retrouvé au XIXe s. sous une couche de plâtre qui l’a protégé des destructions révolutionnaires.
La première église fut agrandie vers la fin du XVe ou au début du XVIe siècle du côté sud. Le mur sud de la nef fut repris en sous-œuvre pour y aménager de grandes arcades, l’une très haute ouvrant sur une chapelle qui forme bras de transept, les autres plus basses donnant sur un collatéral. Les travaux ont probablement traîné car on constate des interruptions, reprises et différences stylistiques. À l’est, la chapelle formant bras de transept est éclairée largement par une baie à quatre lancettes trilobées, complétées par un réseau de soufflets et de mouchettes. À la croisée d’ogives, placée bien plus haut que le couvrement du collatéral, est sculptée une belle clef pendante portant des ornements et une dédicace à la Vierge.
Dans le collatéral éclairé de deux fenêtres assez larges en arc brisé, la construction n’a pas été achevée : sur les piles des grandes arcades et sur les piliers engagés dans le mur sud du collatéral, on voit le départ de nervures qui devaient recevoir sans l’intermédiaire de chapiteaux les ogives des voûtes (remplacées aujourd’hui par un demi-berceau en bois soutenu par des entraits et des poinçons apparents). À l’ouest, on accède à ce nouvel espace par un portail avec un arc en anse de panier surmonté de gâbles et de pinacles, encadrant deux petites niches aujourd’hui vides, bien caractéristique de la Renaissance à ses débuts. Des fragments de vitraux du XVIe s. ont été regroupés dans une fenêtre sud de la nef.
En 1772, une tour-clocher carrée avait été construite, préservant le petit portail Renaissance, mais cloisonnant la première travée du collatéral sud. L’ensemble roman de la nef, soutenu à l’extérieur par des contreforts, n’a jamais été voûté. Le cintre de bois, soutenu par les entraits et poinçons apparents que l’on voit aujourd’hui, n’est pas antérieur au XVIe s. et a été réalisé en deux temps, nef puis chœur, comme le montrent les différences de niveaux et de modénatures.
Les travaux ont concerné les maçonneries des murs gouttereaux, les charpentes et couvertures. La Sauvegarde de l’Art français a donné en 2001 une aide de 22 867 €.
L. S.-P.
Bibliographie :
J.-L. Julien-Prou, « Notice sur l’église de Villethierry », Bulletin de la Société archéologique de Sens, 1854, p. 11-17.
M. Quantin, Répertoire archéologique du département de l’Yonne, Paris, 1868, col. 194.
M. Pignard-Péguet, Histoire de l’Yonne, Paris, 1913, p. 860-861. (Réimpression : Histoire des communes de l’Yonne, 01960 Péronnas, 1998.)
Les vitraux de Bourgogne, Franche-Comté et Rhône-Alpes, Paris, 1986 (Corpus vitrearum, France. Recensement des vitraux anciens de la France), p. 205.
Villethierry-Info, n° 76 et 77, 2002.