Hauts-de-France, Somme (80)
Sénarpont, Église Saint-Denis
Édifice
Église Saint Denis. L’église et le château de Sénarpont occupaient le promontoire formé par le confluent du Liger et de la Bresle qui marque la frontière de la Picardie, face à la Normandie. À la fin du XIVe s., Jeanne de Cayeu, dame de Vismes et de Senarpont, épousa Jean II de Monchy qui fut capitaine de Falaise en 1411. Vingt ans plus tard, Edmond de Monchy, son fils, épousa Jeanne de Montcavrel et s’installa à Montcavrel, en Boulonnais, dont il fit construire l’église. Personnage important qui eut à témoigner au procès de Jeanne d’Arc, il laissa la terre de Senarpont à Edmond, le deuxième de ses fils, qui y obtint en 1463 l’instauration de deux foires annuelles. C’est à ce deuxième Edmond de Monchy, bénéficiaire d’importantes gratifications du roi en 1476 et 1486, que l’on doit attribuer la reconstruction de la nef de l’église qui abrite son gisant, ainsi que celle du château voisin, ruiné en 1433 par les Bourguignons.
Élevée sur un soubassement appareillé en carreaux de grès et de silex taillés, comme il est d’usage en Picardie maritime, l’église est en pierre crayeuse locale. Réparée à de nombreuses reprises en briques, elle a été restaurée après mai 1940 en pierre de Saint-Leu, reconnaissable à sa tonalité grise.
Le mur nord de la nef, d’époque romane, est le vestige d’un prieuré bénédictin auquel appartient aussi le clocher, repris au XVe s., comme en témoignent sa porte et la voûte qui en couvre la salle du rez-de-chaussée. Particulièrement large, la nef est couverte d’une intéressante voûte en charpente, habillée de plâtre, dotée de poinçons, entraits et blochets sculptés : on y trouve un Christ de pitié, Jean-Baptiste avec l’Agneau et un crâne, sainte Anne, le roi David avec sceptre et harpe, Charlemagne avec glaive et livre, saint Nicolas et les trois enfants…
L’ancienne poutre de gloire, en bois polychrome, a été placée au-dessus de l’arc triomphal. Autour du Christ sont représentés la Vierge, saint Jean ainsi que Marie-Madeleine, au pied de la croix en bois écoté. De part et d’autre de la nef font saillie de petites chapelles latérales formant transept, ajoutées vers 1500.
Reconstruit au milieu du XVIe s., le chœur est dû à Jean de Monchy, petit-fils d’Edmond II, qui se distingua particulièrement en 1558, lors de la prise de Calais. Plus étroit que la nef, mais plus élancé, il comprend une travée droite et une abside à cinq pans, éclairées par de grandes fenêtres à réseau flamboyant. Épaulée par de puissants contreforts repris en briques, la belle voûte à liernes et tiercerons porte l’écu à trois maillets du constructeur, tenu par deux lions. À l’origine, les sept grandes verrières étaient dédiées à la Passion et au Jugement Dernier. Les vitraux historiés n’occupent aujourd’hui que les trois verrières centrales, et leur programme iconographique manque de cohérence, car il résulte de la juxtaposition d’éléments en place et d’autres provenant des fenêtres latérales.
Les fonts baptismaux du XIIe s. sont formés d’une cuve en pierre calcaire accompagnée de quatre courtes colonnettes détachées. Un enfeu de la nef abrite le gisant sculpté d’Edmond II de Monchy représenté en armure. Les travaux menés en 2010 ont permis de mettre au jour sous le chœur un caveau profané à la Révolution.
L’église a dû être fermée en 2007, à la suite d’importants désordres apparus au niveau de l’arc triomphal qui dut être étayé d’urgence. Les travaux portent aujourd’hui sur le renforcement des contreforts, la consolidation des voûtes du chœur et de l’arc triomphal, le redressement de la charpente du chœur et la création d’un réseau d’évacuation des eaux pluviales. Pour aider à la réalisation de ces travaux, la Sauvegarde de l’Art français a fait un don de 20 000 € en 2010.
Philippe Seydoux