Auvergne-Rhône-Alpes, Puy-de-Dôme (63)
Sauxillanges, Église Notre-Dame
Édifice
Le prieuré de Sauxillanges est presque contemporain de sa maison mère, Cluny, et il doit son existence au même fondateur. En 910 en effet, Guillaume le Pieux, duc d’Aquitaine, dote une église placée sous le vocable de saint Jean, construite par lui à Sauxillanges dans l’enceinte du château comtal. Le prieuré proprement dit est fondé en 927, à l’instigation de son neveu, Acfred, qui le dote richement. Pendant tout le Moyen Age, Sauxillanges tient l’une des toutes premières places dans le réseau religieux de l’Auvergne.
Du très vaste ensemble prieural, que ses murailles séparaient du bourg, lui-même clos de remparts, il ne reste pas grand-chose, et rien de la prestigieuse église prieurale Saine-Pierre-et-Saint-Martin, qu’Urbain II consacra en 1095, ni de ses transformations successives. Vendue lors de la Révolution, elle fut rapidement détruite.
Mais les moines avaient construit, très tôt, à la suite de donations en 948 et 961, une troisième église, sous le vocable de Notre-Dame, pour le culte paroissial. Cette église était située à l’intérieur même de leur enceinte, qui, à vrai dire, était à l’époque plus comtale que prieurale et comportait encore des mansiones. Peu à peu, les paroissiens furent poussés hors de l’enceinte monastique, mais l’église paroissiale y demeura. Sa fonction l’a protégée et elle fut rendue au culte après la Terreur, non sans avoir perdu son clocher.
La nef est romane, rythmée par de puissants piliers carrés qui supportent, sur l’étendue de ses trois travées, une voûte en berceau légèrement brisé, terminée aux deux extrémités par un arc de même profil. De nombreuses additions des XIVème et XVème s., donnent à l’ensemble de l’édifice une allure gothique.
L’abside pentagonale, voûtée d’ogives (clé aux armes de France), est reliée à la nef par une petite travée de chœur de plan barlong, dont la voûte, à croisée d’ogives également (clé au monogramme IHS), est nettement plus haute que celle de la nef. L’abside est éclairée par de hautes et larges baies garnies de remplages gothiques. La sacristie, qui masque au sud la saillie du chevet, est du XIXème siècle.
Les collatéraux nord et sud constituent un contrebutement de la nef. Ils sont voûtés en berceau brisé comme la nef et se prolongent à l’est par deux chapelles, voûtées à croisées d ‘ogives, qui accolent l’avant-chœur. Le collatéral nord s’ouvre au nord, et par deux portes, sur la chapelle Saint-Godon, formée de deux travées voûtées d’arêtes, séparées par un arc doubleau.
L’entrée de l’église se fait par le collatéral sud : le beau portail à voussures à quatre ressauts porte des traces de polychromie. Le massif occidental, ouvert sur la nef, comporte une tribune. Le XIXème s. a rétabli un clocher (1898).
La décoration intérieure, du XIXème s., est de bonne qualité, mêlant les éléments classiques (faux appareil, bandeaux polychromes) et d’autres plus originaux (scènes figurées d’après l’Assomption de Murillo et !’Ascension de Raphaël). Les vitraux sont de la même époque : certains retracent l’histoire du prieuré.
Le mauvais état des toitures, des infiltrations persistantes, avaient gravement endommagé ces décors. Des désordres commençaient à apparaître (descellement de la clé de l’abside).
La réfection complète des toitures, menée à bien par la commune en 1988, avait été le préalable indispensable à la sauvegarde du décor peint. Une association ad hoc animée par le curé a entrepris cette rénovation, aujourd’hui achevée. Les décors du XIXème s. ont été rétablis à l’identique. D’autre part, le mobilier fragile (tableau dit des « crépiniens » à 15 compartiments relatant la vie de saint Crépin et de saint Crépinien, daté 1606, classé ; statues dorées du début du XIXe s.) a été réuni dans un « trésor » nouveau, aménagé au rez-de-chaussée de la tour, sous la tribune. Les travaux ont permis de retrouver un grand tableau de l’Assomption (XIXème s.), de nouveau accroché dans l’église. La Piétà monumentale du XVème s. reste fixée sur le dernier pilier nord. Ces travaux étaient à la seule charge de l’association.
La Sauvegarde de l’Art Français a accordé une subvention de 25 000 F en 1996.
Ph. M.