Normandie, Manche (50)
Saint-Planchers, Église Saint-Pancrace
Édifice
Au confluent des ruisseaux de l’Oiselière et de Glatigny est implantée la commune de Saint-Planchers dont l’histoire est intimement liée à celle du Mont-Saint-Michel. En effet, depuis le legs de 1248 par Jeanne de Saint-Planchers, l’église et le prieuré de Loiselière, sis sur la paroisse, appartiennent à la célèbre abbaye montoise. Le prieuré, transformé en manoir, puis en château, sert de résidence aux abbés[1].
L’église porte le patronyme de Saint-Pancrace, une rareté qui s’explique par la propagation du culte de ce saint de l’Italie vers la Grande-Bretagne, puis des Îles Britanniques vers la Normandie.
Aujourd’hui le bâtiment se compose d’une nef accostée, côté sud, d’un porche, de deux chapelles formant transept, et d’un chœur à pans coupés. Le clocher s’élève au dessus du faux transept. Une sacristie, devenue chapelle, a été construite ultérieurement sur le flanc nord du chœur. La silhouette de l’église, avec clocher à bâtière et porche, s’apparente à celle d’autres édifices de la Manche du sud comme Bouillon, Carolles ou encore Genêts. Moellons et pierre de taille en granit, le tout chapeauté d’ardoises, concourent à ancrer le bâtiment dans son environnement.
Si l’on peut supposer qu’un premier édifice a surgi de terre dès l’époque romane, il n’en subsiste que peu de traces, hormis des pans de maçonnerie en opus spicatum visibles sur le côté nord de la nef. De nombreux agrandissements aux XVe, XVIIIe et XIX e siècles transformèrent le bâti initial. En 1723, le curé Thomas Cambernon fit boucher la croisée nord pour y faire ériger la sacristie puis fait agrandir les deux fenêtres méridionales pour compenser la perte de lumière. Son parèdre en religion, mais cette fois dans les années 1850, Charles Lerivrain, décida de prolonger la nef de l’église et de lambrisser la voûte.
Comme souvent dans nos contrées, il faut avoir la curiosité de franchir le seuil de ces églises modestes pour y découvrir un patrimoine mobilier tout à fait digne d’intérêt. Pierre Serel, curé de 1746 à 1753, sûrement aidé par des dotations de l’abbé du Mont-Saint-Michel, qui n’est autre que Charles Maurice de Broglie, maréchal de France, s’attache à la décoration intérieure. Lors de la visite épiscopale de 1742, promesse avait été faite « de prendre les mesures nécessaires pour une contretable neuve au grand autel »[2]. Le projet ne sera concrétisé que dans le cadre des travaux échelonnés entre 1751 et 1760, comprenant le maître-autel, les autels latéraux et la poutre de gloire, un ensemble classé au titre des monuments historiques depuis 1978, auquel il faut joindre la chaire à prêcher. Le tableau du maître-autel, copie de l’Adoration des bergers de Pierre-Paul Rubens (Musée des Beaux-arts de Rouen), abondamment décliné par la gravure, est le modèle de la toile du retable, restaurée en 2014. La chaire à prêcher et une Vierge à l’Enfant, en pierre polychromée du XIVe s., témoignent des embellissements de la fin de l’époque médiévale.
Après la restauration du maître-autel et de son tableau, la commune engagea des travaux sur le clocher et le transept qui souffraient d’infiltrations d’eau. La Sauvegarde de l’Art français a participé aux travaux de rejointoiement en 2014, en octroyant une aide de 7 000 €.
Brigitte Galbrun
[1] M. Delalonde, « Le prieuré de Loiselière », Art de Basse-Normandie, n° 36, 1964-1065, p. 52-54.
[2] Arch. dép. Manche, 301 J 28 : visites archidiaconales.