Auvergne-Rhône-Alpes, Isère (38)
Saint-Just-Chaleyssin, Église Saint-Pierre
Édifice
Église Saint-Pierre, autrefois paroissiale, aujourd’hui annexe de l’église paroissiale Saint-Just. Le simple examen d’un dossier bien documenté peut révéler, de façon inattendue, un fait archéologique important, susceptible d’accroître nos connaissances. Tel est le cas de l’église Saint-Pierre de SaintJust-Chaleyssin. À l’exception de la voûte de bois de la nef qui ne date que du siècle dernier, l’ensemble de l’édifice remonte sans contestation possible à une date déjà avancée dans le xiie s. Cependant, on voit à l’extérieur de l’édifice dans le mur nord les restes d’une porte murée, très simplement construite, qui remonte à une date antérieure. Le dégagement de cette porte permettrait peut-être de préciser son âge. Il faudrait également chercher à préciser à travers les enduits récents si tout le mur nord où fut jadis ménagée cette entrée n’est pas également plus ancien que le xiie s. Mais les constatations les plus surprenantes se font à l’intérieur du faux transept et dans l’abside hémicirculaire qui font suite à la nef. À chaque angle du faux transept se dressent des colonnes cannelées, de marbre ou de pierre dure, avec base et astragale, apparemment antiques. Ces colonnes cannelées mesurent 2,60 m de hauteur. À l’intérieur de l’abside, ce sont des colonnettes de même nature mais sans cannelure et ne mesurant que 1,45 m de hauteur qui supportent les retombées d’une arcature aveugle. L’arcature aveugle est romane comme apparemment toute la maçonnerie de cette partie de l’église, mais on a voulu, très manifestement, utiliser au maximum des vestiges de l’église primitive. On a même été jusqu’à copier ou reproduire leur disposition, en jumelant deux colonnettes et en coiffant celles-ci d’un unique tailloir, disposition qui rappelle de façon exemplaire ce que l’on voit dans la crypte de Saint-Laurent de Grenoble ainsi que dans le sanctuaire de l’église du palais de Théodulf à Germigny-des-Prés. La crypte de Saint-Laurent de Grenoble est probablement légèrement antérieure à ce petit édifice. Dans leur ensemble, chapiteaux et tailloirs sont romans mais d’après la photographie, peut-être trompeuse, on peut se demander si deux chapiteaux, au Nord, ne sont pas contemporains des colonnettes. Celles-ci, avec bases et astragales, sont manifestement contemporaines des grandes colonnes cannelées. Nous demandons à Madame Chatel, notre déléguée régionale, spécialiste de l’architecture de placage depuis ses études sur Saint-Laurent de Grenoble et Saint-Pierre de Vienne, de chercher à approfondir les problèmes que l’on peut poser mais non résoudre sur la seule vue d’un dossier. L’église de Saint-Pierre de SaintJust-Chaleyssin, pour la restauration de laquelle la Sauvegarde de l’Art français a accordé une subvention de 20 000 F, mérite d’être classée parmi les monuments historiques et elle fera certainement un jour l’objet de fouilles importantes. Elle nous renseigne sur deux points de l’histoire de notre architecture, la date approximative du monument préroman contemporain de la crypte de Saint-Laurent de Grenoble et, d’autre part, sur le souci de certains architectes du xiie s. de conserver ou de continuer les techniques du passé.
J. H.