Normandie, Eure (27)
Saint-Aubin d’Ecrosville, Église Saint-Aubin et saint-Agip
Édifice
Imposante construction de quarante mètres de longueur en pierre de taille, couverte de belles toitures en tuiles plates, l’église Saint-Aubin, qui était placée sous le patronage de l’abbé du Bec, domine de sa façade majestueuse la place centrale du village.
L’édifice actuel presque entière-ment construit au XVIe siècle à l’initiative du chanoine Nicolas Le Roux, seigneur de Saint-Aubin d’Écrosville, a vraisemblablement remplacé une église plus ancienne dont il ne reste aucune trace. La nef, le bas-côté nord à cinq travées, la façade et sa tour ont été édifiés entre 1515 et 1530 ; le bas-côté sud à quatre travées a été ajouté vers 1560.
Il semblerait que le maître d’œuvre ait d’ abord prévu un plan avec large nef unique, transformé ultérieurement en un vaisseau à bas-côtés, à toitures indépendantes. Faute de moyens, ou en raison du contexte politique, le chœur ne fut pas reconstruit et il fallut attendre les années 1720 pour qu’il soit réédifié en moellons de silex à chaînages d’angles en briques selon un plan rectangulaire plus modeste, aux frais des paroissiens. Une sacristie en briques fut ajoutée dans son prolongement en 1792, plusieurs campagnes de restauration eurent lieu aux XIXe et XXe siècle et, vers 1860, on construisit au sud un local pour la confrérie de charité, aujourd’hui disparu.
La façade monumentale à fronton, dissymétrique, comporte au nord une forte tour carrée épaulée de hauts contreforts décorés de candélabres et éclairée jusqu’à mi-hauteur d’étroites fenêtres en arc brisé. Elle est surmontée d’une flèche octogonale élancée, en charpente couverte d’ardoises. Au sud, se manifestent toute la richesse et la variété du décor Renaissance voulu par le commanditaire. Entre les contreforts, s’ouvre un portail en anse de panier, surmonté d’un gâble à fleurons ; dans le tympan a été placée une statuette de l’Enfant Jésus portant le globe sur un fond de rinceaux. Au-dessus, une baie en plein cintre, garnie de médaillons à bustes aux écoinçons, encadre une rose à quatre cercles tangents partagés en petits panneaux agrémentés d’arabesques. Dans la partie supérieure, une galerie à claire-voie, parée d’une niche surmontée d’un dais et éclairée par quatre ouvertures en anse de panier cantonnées de pilastres et couronnées de frontons, relie la tour nord à la tourelle d’escalier octogonale coiffée d’un lanternon au sud. La rambarde est ornée de cinq bustes de personnages, encadrés de losanges moulurés refaits en terre-cuite vers 1900. Le mur nord est étayé de contreforts à candélabres et percé de quatre baies en tiers-point encore gothiques alors que le mur sud a des contreforts ornés de tempietti, et des fenêtres en plein cintre, dont deux à remplage Renaissance, ainsi qu’un portail du XVIIe siècle à fronton cintré et pilastres doriques encadré de niches superposées.
À l’intérieur, des piliers ronds sans chapiteau reçoivent des arcades moulurées en plein cintre. Nef et bas-côtés sont couverts d’une voûte en charpente. On peut encore observer les traces de départ d’ ogives d’une voûte en pierre jamais construite.
Le chœur, plus bas et plus étroit que la nef, bénéficie d’un décor remarquable du XIIIe siècle. Le retable monumental de l’autel majeur, à pilastres géminés supportant un entablement en plein cintre, encadre un tableau de Pierre-Jacques Cazes, daté de 1736, représentant La Descente du Saint-Esprit avec de part et d’autre les statues de saint Aubin et de saint Éloi. Les murs latéraux ainsi que les deux premières piles de la nef sont recouverts de boiseries peintes, à feuillages dorés autour de médaillons à l’effigie du Christ, de la Vierge de douleur et des évangélistes. Les deux retables latéraux dans les bas-côtés sont consacrés à saint Sébastien et à la Vierge.
Des verrières du XIXe siècle, signées Duhamel-Marette et consacrées à la vie de saint Aubin, ornent les fenêtres des bas-côtés. Un gisant amputé de Richard d’Harcourt (XIVe siècle) est présenté dans le bas-côté sud. Un tableau représentant L’Extermination des premiers-nés égyptiens avant l’Exode est attribué à Adrien Sacquespée (1629-1688) et porte les armes des Pavyot, acquéreurs de la seigneurie en 1688.
En 2016 et 2018, la Sauvegarde de l’Art français a attribué une aide globale de 90 000 € pour la restauration de l’ensemble des toitures et charpentes (sauf le clocher).
Serge Aubé
M. Baudot, « Les églises du canton du Neubourg », Nouvelles de l’ Eure, t. 11, 1er trimestre 1962, p. 16-30. J. Martin-Demézil, « L’ église de Saint-Aubin
d’ Écrosville », Congrès archéologique de France, 138e session, 1980, Évrecin, Lieuvin, Pays d’ Ouche, Paris, 1984, p. 68-82. « L’ église de Saint-Aubin d’ Écrosville », Monuments et sites de l’ Eure, 1986.
Le projet en images
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