Nouvelle-Aquitaine, Creuse (23)
Poussanges, Église Saint-Pierre-et-Saint-Paul
Édifice
Située dans la Marche, entre le plateau de Millevaches, la Combraille et le Franc-Alleu, l’église Saint-Pierre-et-Saint-Paul culmine à une altitude de 683 m, à l’ouest du village. D’après Lecler, Poussanges dépendait de l’archiprêtré d’Aubusson et une première église, placée sous le vocable de Saint-Caprais, s’y trouvait déjà, dès le VIIIe s. ; elle fut donnée par Pépin le Bref au monastère de Manzac, en Auvergne, implanté à environ 80 km vers l’est. Jusqu’à la Révolution, le village abritait un prieuré dont la fête patronale était dédiée aux saints Pierre et Paul, fait qui explique l’actuel vocable de l’édifice. Traditionnellement, les seigneurs du lieu résidaient, non loin, au château de Ribeyreix, dont il ne subsiste aujourd’hui que quelques ruines.
Les transformations subies par l’édifice ne sont pas précisément connues. L’église date en majorité du XIVe s. et se vit adjoindre, au XVIIIe, deux chapelles latérales datant respectivement de 1719 et de 1755, époque à laquelle fut peut-être ajoutée la sacristie appuyée contre le chevet. Hormis cette campagne d’agrandissement, il est tout à fait possible que des travaux aient été menés au milieu du Second Empire, comme pourrait en témoigner la date de deux des cloches insérées dans le clocher-mur occidental.
Construit dans un appareil moyen de granit, l’édifice est constitué, d’ouest en est, d’un clocher-mur prolongé d’une nef de trois travées, la dernière formant chœur à chevet plat ; l’accès se fait par un portail percé côté sud, donnant dans la première travée. L’architecture est rythmée par un nombre très important de contreforts, trois sur la façade est, huit symétriquement disposés contre les murs de la nef et deux au chevet. Le vocabulaire décoratif est simple et limité. Entre les trois grands contreforts du mur occidental, coiffés en bâtière, s’inscrivent deux arcades aveugles qui soutiennent la partie supérieure du mur, en léger encorbellement. Trois corbeaux constituent les vestiges probables d’un auvent ou d’une plate-forme d’accès aux cloches. Cette façade est coiffée d’un fronton triangulaire, sommé d’une croix en pierre fleuronnée, lui-même percé de trois baies cintrées abritant les cloches[1] ; une simple corniche moulurée sépare le pignon de la partie basse du mur. Les façades sud et nord de la nef sont surmontées d’une corniche qui date sans doute d’une surélévation du XVIIIe s., contemporaine de l’érection des chapelles ; seuls trois modillons sculptés de masques, alignés dans la partie orientale du mur nord, témoignent de la hauteur originelle de l’édifice. Le mur du chevet, percé d’une baie axiale en plein cintre, a été surmonté au nord, à une époque inconnue, d’un clocheton-mur sommé d’une croix en métal, qui contient une cloche unique ; une sacristie en moellons et chaînages d’angles en granit occupe toute la partie basse. Coiffée d’un toit en bâtière recouvert d’ardoise, elle est percée, au sud, d’une baie cintrée, et, au nord, d’une porte à encadrement de granit ; elle pourrait dater de la même campagne d’agrandissement que les chapelles au XVIIIe s.. Ces dernières, couvertes elles aussi en ardoise, sont construites en pierre de taille de granit. Elles sont ornées, au rampant et à la base du fronton triangulaire de leurs pignons, d’un bandeau plat, interrompu en son centre par l’arc d’une baie en plein cintre : aux angles inférieurs, se trouvent deux petits socles supportant des pots à feu, qui subsistent seulement au nord. Au-dessus des baies, sont insérées de petites niches à coquilles sculptées, soutenues par des socles. La date de leur érection est donnée par deux inscriptions gravées, au sud, sur l’appui de la fenêtre et, au nord, sur une pierre encastrée sous la niche.
Le portail sud est l’élément décoratif le plus intéressant de l’édifice ; on y accède par trois marches. Il est constitué de cinq voussures moulurées en arc brisé retombant sur une frise-chapiteau à décor floral en crochets, se terminant, à l’embrasure, par deux masques anthropomorphes sculptés ; les chapiteaux de l’entrée surmontent deux colonnes engagées, seules celles de l’ouest ayant subsisté. L’archivolte moulurée de ce portail retombe de chaque côté sur deux petits culots en forme de masques, alors que l’intrados est constitué par un arc polylobé.
L’intérieur, nef comme chapelles, est voûté en berceau, reposant sur une corniche saillante en quart de rond ; il reçoit la lumière de quatre baies et de deux oculi à l’ouest. Les travées sont marquées par deux arcs doubleaux reposant sur des colonnes engagées dont les bases sont moulurées et les chapiteaux décorés de crochets et larges tailloirs. Une tribune en charpente occupe la première travée. L’ensemble du mobilier conservé (autels, chaire, fonts baptismaux, dans le style néo-gothique) remonte à la deuxième moitié du XIXe et au début du XXe s., mais de nombreux vestiges sculptés du XVIIIe s., sans doute contemporains de l’érection des chapelles, prouvent que l’église fut alors non seulement agrandie, mais aussi dotée de nouveaux retables et statues.
La Sauvegarde de l’Art français a accordé 8 000 € en 2005 pour l’assainissement de l’édifice.
Thierry Zimmer
Bibliographie :
Direction de l’architecture et du patrimoine, Médiathèque du patrimoine : Georges de Bussac, Dossier de recensement, 26 février 1959.
- Lecler, Dictionnaire topographique, archéologique et historique de la Creuse, Limoges, 1902, p. 535-537 (réimpr. Marseille, 1976).
- Lacrocq, Les églises de France. Creuse, Paris, 1934, p. 121-122.
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[1] Une cloche est datée de 1711, les deux autres de 1862.