Occitanie, Gers (32)
Montréal, Collégiale Saint-Philippe et Saint-Jacques
Édifice
COLLÉGIA LE Saint-Philippe-et-Saint-Jacques. Montréal, qui se situe aux limites de l’Agenais et de la Guyenne, était rattachée sous l’Ancien Régime à l’évêché de Condom. La ville compte au nombre des bastides construites à partir de 1250 par Alphonse de Poitiers, quand, après la mort de son beau-père Raymond VII en 1249, il hérita du comté de Toulouse. La première église alors édifiée était dédiée à la Vierge ; son emplacement correspondait au bas-côté sud de l’église actuelle. Elle-même avait réutilisé les murs d’une maison à deux étages du XIIe ou du XIIIe s., parfois appelée château, dont la partie occidentale était située dans le prolongement des remparts, comme en témoigne encore le mur sud de l’édifice, percé d’étroites meurtrières.
L’église actuelle fut commencée en 1300 : la date est portée sur le pilier de la nef le plus proche du chœur, du côté nord. Si l’essentiel du bâtiment fut construit au tout début du XIVe s., c’est au moment où fut créé le chapitre collégial que furent élevées ou restaurées les voûtes, grâce aux libéralités de Jean Marre, évêque de Condom. Ce furent moins les guerres avec l’Angleterre que les guerres de Religion qui compromirent définitivement la prospérité de la bastide. L’église Notre-Dame semble alors avoir été détruite aux trois quarts, ce qui explique l’importance des réparations du XVIe s., qui justifièrent une nouvelle consécration de l’église en 1537 ; les voûtes furent reprises plusieurs fois, notamment au XVIIe s. (1682) et au XVIIIe s. (1779). Le dernier niveau du clocher date du XVIIIe siècle.
Le plan comporte trois travées de nef avec bas-côtés, une travée de chœur et une abside à pans coupés. Au nord, une absidiole sur plan carré prolonge le bas-côté ; au sud, une absidiole arrondie correspond à l’abside de l’ancienne chapelle.
Le portail principal situé au nord est monumental. Il s’ouvre au fond de deux profondes voussures retombant sur de fines colonnettes par l’intermédiaire de chapiteaux presque annulaires. Le tympan conserve une niche, vide, surmontée d’un petit dais. Le tout est dominé par un grand gâble à crochets, flanqué de deux pilastres ornés de choux frisés. Dans la partie haute de cette façade, on note la présence de pierres en relief qui sont peut-être le témoin d’un auvent extérieur disparu ; elle est éclairée par une grande fenêtre au remplage gothique. Une tourelle d’escalier pentagonale donne accès aux combles. La sacristie néogothique a été construite dans le prolongement du bas-côté. Le clocher s’élève sur la dernière travée du bas-côté sud : l’hémicycle de l’absidiole a été racheté à une certaine hauteur par des encorbellements qui portent une haute tour, dont le plan forme un polygone irrégulier ; cette dernière est desservie par une vis en hors œuvre dans une pile quadrangulaire posée de biais, deuxième escalier dans l’édifice. Un étage supplémentaire à fenêtres en plein cintre sommé de pinacles en forme de boules a été construit à l’époque classique (selon Pierre Dubourg-Noves). Le chevet à cinq pans est percé de hautes fenêtres en arc brisé ; il peut être comparé à celui de Mirande. Du côté méridional, l’édifice surplombe un fossé, ce qui explique sans doute le nombre important de contreforts qui épaulent l’édifice : les uns s’arrêtent sous le niveau bas des fenêtres, les autres montent jusqu’à la retombée du toit. L’élévation intérieure est très élancée. La nef porte cependant la trace des interventions successives qui ont modifié le parti initial. Les voûtes d’arêtes, en briques sur les trois travées orientales, reposent sur de grosses piles rondes au socle polygonal : c’est la disposition que l’on peut observer entre la troisième et la quatrième travée ; cependant, dans les deux premières travées, elles ont été maladroitement noyées, sans doute au XVIIe ou au XVIIIe s., dans des massifs en pierre de section carrée. L’abside à sept pans à l’intérieur, les parties droites étant séparées en deux par une mince demi-colonne, est couverte par une voûte reposant sur huit nervures dont la clé figure un masque barbu. Les trois pans du centre sont percés de hautes fenêtres à deux lancettes surmontées d’un quadrilobe s’inscrivant dans un cercle. La chapelle sud correspond, comme nous l’avons dit, à l’abside de la première église, les bases et les chapiteaux permettant de la dater de la fin du XIIIe siècle ; c’est elle qui porte le clocher, elle est éclairée par une petite baie en arc brisé, ouverte sur le côté sud. Au nord, une chapelle rectangulaire est couverte d’une voûte sur croisée d’ogives reposant sur des culots. De grandes arcades font communiquer la nef avec les bas-côtés. Malgré la date tardive de certaines reprises, l’ensemble donne une impression d’homogénéité. Des vitraux ont été placés au XIXe s. dans les grandes fenêtres.
Cet intéressant témoin du gothique méridional, qui a fait l’objet d’une monographie très détaillée par Pierre Dubourg-Noves dans le volume du Congrès archéologique de 1970, mériterait à l’évidence d’être classé au nombre des monuments historiques.
La Sauvegarde de l’Art français a accordé une subvention de 6 098 € en l’an 2000 pour la restauration des maçonneries de la rose occidentale et de la fenêtre de la première travée nord.
Fr. B.