Nouvelle-Aquitaine, Pyrénées-Atlantiques (64)
Méracq, Église Saint-Julien de Brioude
Édifice
En 1953, par délibération du conseil municipal, la commune de Méracq exprima le souhait de construire une nouvelle église au centre du village, tout en réutilisant « le plus possible d’ouvrages » de l’ancienne église paroissiale, dont l’état était jugé critique. Naquît ainsi l’église du Cœur-Immaculé-de-Marie ! Lucien de Maleville, procédant au Recensement des édifices anciens de la France, en 1958, qualifie la nouvelle construction d’« absolue réussite d’art régional ». Dans la « ravissante petite église néo-basque » construite en 1956, on a réinséré la baie d’axe de son aînée.
Mais qu’allait devenir alors, au hameau de Loumeracq, à l’écart du village et des routes principales, l’ancienne église de Saint-Julien de Brioude, construite en bord de pente et marquée par son passé médiéval ? Problèmes de dévers des murs et des contreforts, de fissures, d’entrées d’eau par la toiture, désagrégation des enduits intérieurs, dégradation des parements… L’intervention menée avec grand talent par Étienne Lavigne, architecte DPLG, sur la base d’une étude fort bien documentée, a pris la mesure de cet héritage.
Les origines remontent au XIIes., au plus tard au XIIIesiècle ; elles ont laissé pour trace principale, datant pour une part de ce premier état de la construction, l’ancien clocher-mur transformé par la suite (au XIXes.) en clocher carré recouvert d’un bardage d’ardoises clouées. Les onze paroisses de la stratégique vicomté de Louvigny, formée au Xes. et devenue comté en 1554, passèrent aux mains des Gramont par Corisande d’Andoins et demeurèrent dans leur patrimoine jusqu’à la Révolution. Paul Raymond (Dictionnaire topographique du département des Basses-Pyrénées, 1863) rappelle d’ailleurs ce rattachement gascon : Méracq dépendait du Tursan et de la subdélégation de Saint-Sever.
La nef et le chevet à trois baies appartiennent à la fin du XVes. ou au début du XVIes. et présentent les caractères d’un style gothique tardif ; un fragment de décor peint, dans la nef, appartient probablement à ce passé. La physionomie d’ensemble est modifiée au XVIIes. par la construction des arcs et piliers séparant la nef et le bas-côté et par l’adjonction d’une chapelle attenante dont le projet apparaît en 1648 dans la requête adressée par Pierre Laborde, seigneur de Saint-Loubouer (Landes), au duc de Gramont. Terminée en 1681, cet embellissement ne donnait pas entière satisfaction en 1695, puisque le curé de Méracq intervenait auprès de son évêque afin que le sieur Laborde procède à l’aménagement de la chapelle, qui ne comportait qu’un autel de pierre.
Une importante série d’ouvrages destinés à l’amélioration des conditions du culte fut exécutée dans la deuxième moitié du XVIIIesiècle : le plafond à lambris peint, parsemé d’étoiles sur fond bleu (éléments subsistants au-dessus des fonds baptismaux), l’autel-tombeau en bois peint et doré. D’importantes interventions architecturales se rattachent à la même époque : construction d’une sacristie, percement de baies au nord et au sud, bouchement d’une fenêtre près des fonts baptismaux et renforcement des murs à l’aide de nouveaux contreforts. Le délabrement général n’en est pas moins constaté en 1812 et la nécessité d’importantes réparations affirmée dix ans plus tard. Il appartenait à la deuxième moitié du XIXes. d’en réaliser l’essentiel. En 1850, l’effort se porta sur les cloches que l’on refondit, en 1866, sur la toiture (il se renouvellera en 1924).
Quoique de dimensions relativement vastes (et la hauteur supposée du clocher sous sa forme ancienne le confirme), l’édifice ne renie pas la modestie de sa construction. Les murs d’appareil mixte, irrégulier, à forte part de galets, sont recouverts d’un crépi de tonalités dorées très endommagé ; la pierre de taille souligne les ouvertures et les contreforts. La couverture de tuiles canal sur charpente de chêne, l’une et l’autre de constitution ancienne, se termine en croupe polygonale à l’est. L’extraction de la baie axiale et son rebouchement avec des briques ont fragilisé le chevet ainsi éventré. Le contrefort sud, près du clocher, a été malmené à plusieurs reprises : lors de la construction du bas-côté au XVIIes. et lors de la transformation du clocher au XIXes., avec réduction de l’ancienne surface du clocher-mur médiéval. L’auvent qui protégeait la porte occidentale n’est plus visible, sinon par les corbeaux qui le soutenaient ; l’arc surbaissé orné de deux boudins concentriques se prolongeant en piédroits sur socles équarris, sans moulure, remonte à la fin du XVes. ou au début du XVIesiècle. Les portes anciennes (XVIIIesiècle ?) sont demeurées en place. L’existence d’un second auvent est dévoilée, sur le pan nord-est du chevet, grâce aux corbeaux qui lui servaient d’appui.
Les plafonds de bois sont récents, mais il subsiste près des fonts baptismaux un fragment ancien constitué de planches d’origine repeintes en bleu semé d’étoiles –de nombreuses autres planches de ce plafond à lambris ont été réemployées au XIXeet dans la première moitié du XXesiècle. Á l’ouest est installée une tribune. Les baies percées au XVIIIes. dans les murs sud et nord sont pourvues, à l’extérieur, de linteaux de pierre et, à l’intérieur, de linteaux en bois. Des vestiges de vitraux existaient dans la baie nord-est du chevet et dans la baie de la sacristie.
Le maître-autel avec monogramme marial (M.A.) au centre et son tabernacle ont été conservés ainsi que l’autel latéral de la chapelle (avec monogramme M. A.sur le côté) ; tous deux datent du tournant du XVIIIeet du XIXesiècle ; le décor du médaillon central du maître-autel manque. Le tabernacle et les gradins sont du XIXesiècle. Les fonts baptismaux de bois peints et un lustre de cuivre complètent ces ensembles.
Pour la mise hors d’eau de l’édifice et son assainissement, la Sauvegarde de l’Art Français a accordé 11 000 € en 2007.
Paul Mironneau