Occitanie, Gers (32)
Marsolan, Église Notre-Dame-du-Rosaire
Édifice
Au sommet d’un des coteaux verdoyants de la région de Lectoure – un des nouveaux évêchés érigés en 1317 par le pape Jean XXII – et à quelques kilomètres de sa modeste cathédrale, Notre-Dame de Marsolan semble terminer le bourg, du côté est, dominant l’Auchie qui coule un peu plus loin. Il est difficile de trouver la moindre documentation sur cet édifice, église paroissiale comme tant de milliers d’autres. Marsolan, au Moyen Âge, était un fief des vicomtes de Lomagne qui y possédaient un château, cité dès 1082 et dont il reste quelques ruines de l’autre côté du village.
Bien que l’on puisse discerner, dans certaines parties des murs, des appareils différents qui sont sans doute des restes d’un édifice plus ancien (notamment au nord), l’église Notre-Dame-du-Rosaire est essentiellement un édifice du XVIe s., au plan très simple, et qui fut peut-être inachevé. C’est un grand rectangle, en somme, sur les côtés nord et sud duquel sont réservés les espaces de chapelles latérales peu profondes. La nef est couverte d’un berceau brisé lambrissé et n’a jamais possédé de voûtes. Les chapelles sont couvertes, en quelque sorte, de plafonds et s’ouvrent sur la nef sous des linteaux en bois, habillés de plâtre en forme d’arcs segmentaires. Ces dispositions paraissent, en termes d’architecture, un peu inabouties : on imagine volontiers un projet d’église à nef unique et chapelles latérales entre contreforts, selon la typique formule méridionale, mais dont il manquerait toute la superstructure. Mais ce n’est là sans doute qu’une vision rétrospective d’un édifice qui a pu aussi bien être conçu dès le départ de façon modeste, car les arcs diaphragmes qui donnent le profil du berceau lambrissé semblent bien appartenir à la même campagne de construction que le reste, sans que l’on note le moindre départ de voûte à leur naissance. Peut-être est-ce alors le bizarre couvrement des chapelles qui est un achèvement postérieur ? L’édifice, comme on va le voir, a été remanié et décoré au XIXe siècle. Un imposant clocher carré domine l’ensemble, hors-œuvre, touchant à l’église à l’angle sud-ouest. Lui aussi a une base plus ancienne, qui a déterminé son plan. La chambre des cloches s’élève au sommet du fût de la tour, cantonné de trois contreforts d’angle qui en épaississent fortement la silhouette. Celui de l’angle sud-est s’amortit par un cadran solaire du XVIIIe s. bien mis en évidence, sorte d’horloge publique sans mécanisme, et durable… Quatre culots sculptés, figurant les symboles des évangélistes, subsistent à l’intérieur de la salle basse, qui a peut-être servi de baptistère. L’appareil des deux premiers niveaux du clocher, comme celui du mur nord de l’église (en partie), de plus petit module, se distingue du reste de la construction.
On croit comprendre que l’édifice médiéval était plus court (un changement d’appareil se note aux deux-tiers environ du mur nord), plus étroit (le mur sud, plus mince que le mur nord, est entièrement du XVIe s.), mais déjà flanqué d’un clocher-tour. Après les destructions des guerres de Religion, le vaisseau a été reconstruit sous sa forme actuelle, et la tour relevée et/ou surélevée. L’appareil utilisé pour la reconstruction a assez fidèlement reproduit celui de l’édifice précédent, en tout cas pour la façade sud, et les distinctions sont difficiles. L’édifice du XVIe s. devait comporter un chevet plat, l’abside actuelle est postérieure à 1824. C’est une construction de style gothique à cinq pans, voûtée sur croisée d’ogives, percée de trois fenêtres munies de vitraux. L’église est peu ornée, et ses modénatures sont simples. Les ouvertures en façade sud sont caractéristiques du XVIe s. : le portail, dont l’archivolte en plein cintre est élégamment moulurée et s’encadre entre deux pilastres portant une corniche, la petite porte, au linteau droit, avec le même effet de mouluration et de pilastres latéraux, mais plus simple, la fenêtre, enfin, étroite et haute, elle aussi en plein cintre, mais semblant s’inspirer des fenêtres plus anciennes du mur nord, toutes trois ayant des ébrasements à gorge.
À l’intérieur, le décor est plutôt sobre. Le berceau lambrissé est peint d’un ton uni, et chacune des quatre chapelles présente un décor au pochoir d’un motif différent, de la fin du XIXe siècle. Cette simplicité cependant n’exclut pas toute recherche, comme l’attestent des frises décoratives, ainsi que des panneaux plus richement composés, accompagnant des statues ou les autels. Un luminaire approprié complète toujours ce décor ; chaque chapelle disposant de son lustre, tandis que trois autres lustres pendent dans la nef, l’un d’un assez beau modèle de la première moitié du XIXe s. qu’on imagine plutôt dans le salon d’une grande demeure et qui a dû, comme les autres, être offert à la paroisse. On remarque quelques tableaux, une Crucifixion d’après Rubens, une Mise au tombeau signée « Brune fecit, 1850 à Nérac » , et, selon Paul Mesplé, une Vierge à l’Enfant apparaissant à deux religieuses, du XVIIe s., tableau chanci presque illisible. L’abside présente un visage très inhabituel : construction du XIXe s., donc, autant que l’on puisse en juger, elle est voûtée sur croisée d’ogives, avec une clé sculptée, le tout polychrome ; ses baies sont garnies de vitraux historiés (par Thibaud, Clermont-Ferrand, 1869). Elle se trouve entièrement occupée par un buffet d’orgues. En fait, cette disposition est très récente, l’orgue lui-même étant une réalisation d’un ancien curé de Marsolan, l’abbé Jean Gasparotto, en 1985-1987, effectuée à partir d’éléments provenant de l’orgue de chœur de l’église de La Buffière (Vendée).
Pour des travaux de restauration de la charpente et des couvertures, la Sauvegarde de l’Art français a apporté 8 000 € à la commune, versés en 2005.
Olivier Poisson
Bibliographie :
- Mesplé (collab.), Sites et monuments du Lectourois, Lectoure, 1974.
Bulletin des Amis des anciennes églises du Gers, passim.