Nouvelle-Aquitaine, Creuse (23)
Maisonnisses, Église Saint-Sébastien
Édifice
Église Saint-Sébastien, jadis Saint-Jean-Baptiste. La date exacte de la fondation de Maisonnisses est inconnue. Ne figurant sur aucun document relatif aux Templiers, auxquels elle a été témérairement attribuée, on peut penser qu’elle appartenait, dès l’origine, à une commanderie d’Hospitaliers.
Elle est établie sur une crypte de la seconde moitié du XIIe s., espace rectangulaire qui subsiste sous les deux travées orientales de l’église haute. Son double vaisseau est soutenu par une file de deux colonnes rondes appareillées à bases aplaties et vigoureux chapiteaux tournés nus, en granit sous tailloir carré, qui supportent les départs de voûtes d’arêtes en moellon. Une demi-colonne semblable reçoit la retombée occidentale des voûtes et, près de l’escalier d’accès, est visible, dans l’angle sud-ouest, sur sa colonnette engagée, un seul des chapiteaux analogues mais plus petits qui recevaient les voûtes d’arêtes aux angles. Á l’est, deux nervures divergentes encadrent une étroite et profonde baie percée dans le soubassement du chevet et accostée de deux crédences. Deux crédences existent aussi dans la paroi ouest. La qualité sans doute médiocre du mortier, tel qu’il apparaît dans les voûtes, a rendu nécessaire un épaississement plus tardif des gouttereaux, qui diminue d’autant le volume de cette crypte et la défigure. L’accès se fait au sud-ouest par l’extérieur de l’église supérieure, dans la cour de la commanderie disparue.
L’église haute n’est pas antérieure à la première moitié du XIIIe s., mais présente un plan commun, dès la seconde moitié du XIIe dans l’ouest de la France, à beaucoup d’églises de Templiers, d’Hospitaliers de Saint-Jean et d’Hospitaliers de Saint-Antoine, à savoir un rectangle dont la longueur est triple de la largeur et fréquemment recoupée en trois travées. Ici, trois voûtes d’ogives à nervures élégies de cavets, reposant sur des culots formés de trois têtes d’hommes ou de femmes, couvraient le vaisseau. Mais ce voûtement ne subsiste plus que dans la travée orientale, le reste, effondré, ayant été remplacé tardivement par un plafond de bois curviligne. L’entrée se fait par le mur nord de la travée occidentale. Tout près se trouve un enfeu dont les dispositions montrent que le sol du XIIIe s. était plus bas que l’actuel de près d’un mètre. Il abrite un remarquable gisant qui fut retrouvé vers 1830 au sud de l’église, dans les ruines de l’ancienne commanderie, édifice fortifié des Hospitaliers flanqué de grosses tours et ceint de fossés, où avait fait étape, en juillet 1486, le prince Zizim (Djem Sultan), frère du sultan Bajazet II, dans un voyage limousin sous la « protection » du Grand Maître de l’ordre, Pierre d’Aubusson. Cette forteresse fut vendue à la Révolution puis démolie. Longtemps abrité debout dans un angle de l’église, le gisant qui, dans un testament de 1654, passe, sans doute à tort, pour celui du fondateur de la commanderie, a été classé M.H. en 1904, et plus récemment, rétabli dans son enfeu.
Extérieurement, l’église fait alterner le moellon des murs et le granit appareillé des contreforts. Sa fenêtre d’axe a été restaurée au XVe s. avec meneau central sous trilobes, soufflets et mouchettes, mais les deux longues baies, presque en plein cintre, visibles au midi, sont d’origine. Les contreforts extérieurs ont été tardivement refaits et épaissis et une chapelle d’âge classique a été ajoutée au nord du chœur. Le portail d’entrée, très ébrasé, sous auvent, typiquement limousin, est pris entre deux contreforts épais au nord de la nef. Il comporte trois larges voussures minces en arc brisé sous archivolte. Deux d’entre elles sont bordées d’un tore et correspondent à deux minces colonnes de même diamètre, au-dessus desquelles se déploient deux frises de chapiteaux à crochets. L’arête du toit obtus, couvert de tuiles canal, est sommée à l’ouest d’un petit campanile carré en charpente revêtu de bardeaux et coiffé d’une modeste flèche octogonale couverte de même.
Les voûtains du chœur ont reçu, à la fin du XVIIIe s. ou au début du suivant, des effigies peintes, plutôt médiocres, des évangélistes. On remarque, dans les murs du chœur, au nord, une armoire liturgique cintrée et au sud une piscine rectangulaire.
L’autel néoclassique et son retable sont du début du XIXe s., encadrés de chaque côté par un saint Jean et un saint Sébastien polychromes en bois, un peu plus anciens. On voit, en outre, dans la nef, une clé circulaire de granit à décor floral du XIIIe s. provenant d’une des voûtes détruites, un bénitier godronné en granit du XVIIe s. et quatre dalles funéraires timbrées de la croix des Hospitaliers.
Pour aider à la restauration de la couverture de l’église et de la sacristie, ainsi qu’au renforcement du clocher, la Sauvegarde de l’Art français à versé 9 000 € en 2006.
Pierre Dubourg-Noves