Centre-Val de Loire, Loiret (45)
Le Moulinet-sur-Solin, Église Saint-Philippe
Édifice
Mentionnée pour la première fois en 1159, la paroisse relève, jusqu’à la Révolution, de la puissante abbaye bénédictine de Saint-Benoît-sur-Loire, qui, peu de temps auparavant, avait fait l’acquisition de l’important domaine du Moulinet. Cette dépendance pourrait expliquer le choix du vocable de l’église, dédiée à saint Philippe, patron peu honoré dans le diocèse, le roi Philippe 1er, qui régna de 1060 à 1108, ayant élu sa sépulture dans le chœur de l’abbatiale.
Fondée vers la fin du XIIe s., l’église est modifiée à plusieurs reprises. A l’origine, elle se compose d’une simple nef voûtée en berceau et terminée par un chevet plat ou, plus vraisemblablement, une abside. En subsiste la façade occidentale, épaulée par deux gros contreforts et dont le soubassement est délimité par un bandeau en saillie à motifs en « dents de scie ». Ces motifs se répètent sur le portail en arc brisé dont l’archivolte à boudin retombe sur deux colonnettes aux chapiteaux ornés de feuilles s’enroulant en volutes. De cet état primitif, témoignent encore, dans la nef, les colonnes engagées prévues pour recevoir les extrémités des arcs doubleaux de la voûte ; leurs chapiteaux sont décorés, selon les cas, de feuillages, de figures, ou d’animaux fantastiques. Rien ne prouve cependant que la nef ait été réellement couverte, à l’origine, d’une voûte en berceau, car seule une voûte lambrissée, laissant apparaître les entraits et les poinçons de la charpente, est mentionnée dans les descriptions que l’on possède pour le XIXe siècle.
L’édifice est profondément transformé à l’époque gothique. Des collatéraux sont ajoutés à la nef et le chœur, agrandi, prend la forme d’une abside à pans. Cet état subsiste jusqu’à l’époque révolutionnaire. Après une période d’abandon, l’église menace ruine. En 1829, des pierres tombent des voûtes de la nef et du chœur. L’édifice échappe finalement, mais de peu, à la démolition, mais non à des travaux de grande ampleur ; entrepris au cours de la première moitié du XIXe s., ceux-ci en changent, une nouvelle fois, radicalement l’aspect.
Ne demeurent plus, en 1845, que la nef et la façade occidentale de l’état précédent. Le chœur et les bas-côtés gothiques ont été supprimés, et les grandes arcades de ces derniers intégrés dans les maçonneries nouvellement élevées. Un chœur à abside est reconstruit sur une surface moindre, en reprenant peut-être les fondations de celui de l’édifice primitif. Le style roman est progressivement remis au goût du jour dans les années qui suivent, tant dans l’architecture que dans le décor. La charpente est modifiée et de fausses voûtes en briques et plâtre, en berceau sur la nef, en cul-de-four dans le chœur, construites après 1864. L’enduit des parois intérieures est intégralement traité en faux appareil, l’ajout de frises à « dents de scie » et de corbeaux à masques humains achevant de réunir parties neuves et parties anciennes. Délimité par deux piles à chapiteaux feuillagés et bases de style néo-roman, un faux narthex à voûtes d’arêtes en plâtre est construit au revers de la façade principale. Il contribue à supporter un clocher de charpente pourvu d’une flèche. Enfin, une sacristie est greffée au sud, à la jonction de la nef et du chœur.
En grande partie conservé, le mobilier avait été renouvelé à la même époque. Un maître-autel de style néo-roman est consacré le 8 octobre 1853 (inscription peinte au revers de la pierre d’autel). Il est surmonté d’une niche en plein cintre occupée par une statue en plâtre du Bon Pasteur, également figuré sur la porte du tabernacle.
L’état de l’église laissait beaucoup à désirer ces dernières années, à tel point que les impératifs de sécurité du public avait conduit la municipalité actuelle à en décider la fermeture provisoire. Sa mobilisation exemplaire a toutefois permis d’en mener à bien la restauration intégrale, opération que la Sauvegarde de l’Art français a soutenue à hauteur de 12 000 € en 2015.
Gilles Blieck
Bibliographie :
E. Michel, « Le Moulinet », dans Monuments religieux, civils et militaires du Gâtinais depuis le xie jusqu’au xviie siècle, Lyon-Orléans-Paris, 1879, p. 123 et pl. LVI, fig. 3.
M. Prou et A. Vidier (éd.), Recueil des chartes de l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, t. I, Paris, 1907, CLXXI, p. 392-394.