Le prieuré de Belaygue relevait du monastère de Ligueux. Il tire son nom d’une source qui coule à proximité. Sa chapelle ruinée, qui seule subsiste, est une construction rectangulaire au pied d’une courte pente que domine une petite falaise de calcaire tendre. Peu accessible à l’intérieur à cause des ronces, orties et chardons qui empêchent d’y pénétrer, elle apparaît semblable à ces nombreuses chapelles appartenant le plus souvent aux Templiers, hospitaliers de Saint-Jean ou hospitaliers de Saint-Antoine. Elles sont fréquentes entre la fin du XIIe s. et le milieu du siècle suivant dans le sud-ouest de la France : Saintonge, Angoumois, Poitou, Bordelais, Périgord. Elles sont d’ordinaire voûtées d’un berceau brisé, continu ou scandé par deux doubleaux ; sur les murs latéraux, souvent aveugles, des corbeaux conservent la trace d’appentis au-dessus de la porte occidentale, ce type d’ouvrage de bois porte encore le nom de ballet. Plus tard, les travées sont couvertes de voûtes d’ogives. Il arrive que les travées de nef soient couvertes d’un berceau mais la travée de chœur est toujours voûtée d’ogives.
Dans le cas présent, l’édifice, bâti en belles assises régulières de calcaire, possède bien un triplet avec trois baies en ligne, ébrasées vers l’intérieur. L’arête de leur ébrasement intérieur est amortie de chaque côté par un tore formant une mince colonnette appareillée, surmontée d’un petit chapiteau allongé pris dans le bloc. Ce dernier s’applique sans tailloir à la partie inférieure d’une moulure en quart-de-rond intercalée à la naissance du plein cintre des trois baies. Deux autres baies semblables, mais sans bordure torique, se font face dans le tiers oriental des gouttereaux nord et sud. Ruinées, elles ont perdu le cintre qui les coiffait. De berceau, il n’y a pas de trace, mais les parties hautes ayant été refaites, on ne peut affirmer qu’il n’y en a jamais eu. Le mur ouest comprend une baie unique bouchée dans l’axe, semblable à celles de l’est, mais sans bordure torique, et une seconde baie plus petite surmontant la première dans la partie en moellon. L’ébrasement d’une porte médiévale se lit dans l’angle nord-ouest.
La porte principale, prise dans un avant-corps plat, occupe l’angle sud-ouest du gouttereau méridional. Fortement ébrasée, elle comprend, outre une archivolte à pointes de diamants, cinq moulures toriques à peine brisées, de diamètre différent selon les voussures. Entre ces tores s’intercalent des couvre-joints amortis par des filets, de minuscules cavets, des rangs de perles… Les chapiteaux très écrasés, curieusement faits d’un très bref tronc de cône surmontant l’astragale, n’atteignent pas en hauteur celle des tailloirs, formés d’une tablette surmontant deux cavets superposés. Entre la deuxième et la troisième voussure, du côté gauche, a été intercalé sur les tailloirs un socle polygonal semblable aux chapiteaux, un peu plus haut toutefois. Il n’a pu porter de statue, vu la courbure des voussures. Une lampe, peut-être ? Ces chapiteaux sont assez inhabituels. On les situerait bien à la fin du Moyen Âge, voire au XVIe s., mais le portail fait corps avec la structure du bâti et semble bien contemporain de l’église, qui ne peut guère dater que du XIIIe s. au plus tard : un archaïsme de cette durée n’est pas concevable. Les bases, très usées, n’apportent aucune indication chronologique, même approximative. Le campanile, clocher-arcade très élancé, offre deux niveaux de baies cintrées sous un gâble veuf de sa pointe. Il surmonte l’angle sud-ouest et, à demi, le portail, près d’un contrefort pris dans la paroi occidentale : il semble avoir été remanié ou reconstruit. Plus loin vers la droite, trois corbeaux s’intercalent entre l’avant-corps de la porte sud et un contrefort large et très plat qui marque l’angle sud-est. On ne voit pas de marques de tâcherons. Seulement, à droite de la porte, une croix incisée qui paraît ancienne près d’un cadran solaire gravé.
L’extérieur du mur oriental est des plus simples. On ne peut guère y signaler que l’arc des trois baies, réservé dans un petit bloc monolithe couvert d’un décor plus gravé que sculpté, où apparaissent des stries, de petites croix, des fleurettes et des motifs perlés. Entre chaque baie, on devine, décolorés et très effacés, des blasons avec un encadrement de volutes caractéristique du XVIIe siècle.
Pour la confortation des ruines de la chapelle et la restauration du campanile, la Sauvegarde de l’Art français a accordé 4 573 € en 2001.
P. D-N.