Auvergne-Rhône-Alpes, Ain (01)
Germagnat, Église Saint-Germain
Édifice
Église Saint-Germain. Le territoire de la commune de Germagnat était autrefois en Franche-Comté ; il a été rattaché au département de l’Ain (Bresse) par la Révolution. La paroisse relevait de l’abbaye de Gigny. Dans les textes, elle n’apparaît pas avant le XIIIe s., mais elle devait être plus ancienne, comme l’indique son nom d’origine gallo-romaine, nom qui a pu inciter les habitants à choisir saint Germain pour patron.
Au XVe s., les seigneurs de Toulonjon, dont le château dominait le village à l’est, construisirent, sur le côté sud de la nef, une chapelle dont le vocable semble avoir varié selon les époques : Saint-Laurent (1613), Saint-Jean-Baptiste (1655), Notre-Dame-de-Pitié (1760). Cette chapelle fut sans doute bâtie par Claude de Toulonjon, maréchal de Bourgogne et gouverneur du duché en 1422. Il y avait aussi un autel dans la nef, au nord, près de l’entrée du chœur, sous le vocable de Saint-Georges (1613), ou de l’Ange-Gardien (1760). Au XVIIIe s., le chœur fut transformé par le curé : « L’église a été bâtie et entretenue avec soin. On le doit d’abord aux seigneurs de Toulonjon, ensuite dans les derniers temps à un curé qui employoit tous les revenus de son bénéfice qui étoit de trois à quatre mille francs pour l’embellissement de l’église. Ce fut lui qui fit bâtir avant la Révolution, la cure actuelle qui est très belle … » (Visites de Mgr Devie, journal du vicaire général de La Croix, 1825). En 1744, les habitants traitèrent avec Claude et Jean-Baptiste Pescheur, père et fils, de Valfin [Jura], pour recouvrir la nef de leur église, qui menaçait ruine et se trouvait prête à tomber. En même temps, ils firent reblanchir la nef et traitèrent avec leur ancien curé, pour la reconstruction du « chapiteau devant la grande porte de l’église ». Ces aménagements du XVIIIe s. furent complétés par la construction d’une sacristie au chevet de l’église. À l’extérieur, une litre seigneuriale ceinture tout l’édifice, y compris cette sacristie, et porte encore par endroit, les armes des Meyriat, seigneurs du château de Toulonjon depuis 1588.
Le clocher, détruit sous la Révolution, ne fut pas reconstruit et l’on se contenta, depuis, d’un beffroi de fortune, au demeurant très pittoresque, installé entre l’église et la cure. En 1843, François Moget, ouvrier plâtrier de Nantua, refit le lambris plâtré de la nef. Enfin, en 1894-95 on remplaça les lauses par de la tuile plate sur la totalité de l’église (Tony Ferret, architecte, et Héritier, entrepreneur à Montfleur) ; on répara aussi, une nouvelle fois, le plafond en lambris et plâtre de la nef.
La façade ouest est percée d’un portail gothique en tiers-point accompagné, à l’extérieur, à gauche d’un pupitre et à droite d’un bénitier. On voit aussi les corbeaux de l’ancienne galonnière disparue. La nef, autrefois à charpente apparente, est couverte maintenant d’un plafond plâtré ; le sol est fait de grandes dalles de pierre. La tribune, mentionnée en 1655, au- dessus de l’entrée, a disparu.
La chapelle latérale est d’architecture gothique. Elle est éclairée au sud, par une fenêtre à remplage flamboyant orné en son centre d’un écusson armorié. Elle présente la particularité d’empiéter sur la nef par l’intermédiaire d’une colonne à chapiteau qui reçoit l’angle nord-ouest de la croisée d’ogives. Les autres branches reposent sur des culots où l’on voit un ange tenant un écusson aux armes de la famille de Toulonjon (écartelé, aux 1 et 4, de gueules à trois fasces d’argent et aux 2 et 3, de gueules, à trois fasces ondées d’or). Cette chapelle possède aussi un enfeu en accolade dont l’archivolte est décorée de phylactères portant la devise « A tout » des seigneurs, et de deux anges aux longues ailes présentant ensemble un écu à la pointe enroulée portant la lettre H surmontée d’une croix. Cet enfeu pouvait abriter le tombeau de Claude de Toulonjon, décédé en 1427 et inhumé à Germagnat. Le lavabo trilobé, gothique, est à deux étages. Sur l’autel de la chapelle, un ancien curé a fait placer la châsse de saint Quirinus contenant une effigie de cire apportée de Rome à Lyon et de Lyon à Germagnat en 1867. On remarquera l’entaille au cou rappelant la décollation du martyr.
Le chœur à chevet plat est voûté en berceau brisé et divisé en trois travées par deux arcs doubleaux, portant l’un sur des piédroits, l’autre sur des corbeaux ; l’un d’eux doit dater seulement du réaménagement de l’église au XVIIIe siècle. Ce type de voûtement en berceau brisé se rencontre localement au XIVe siècle. La fenêtre absidiale gothique, qui devait être assez haute et étroite, comme dans les églises voisines de cette époque, a été masquée à l’extérieur par la sacristie et à l’intérieur par la pose d’un grand tableau du Calvaire. Les murs et les voûtes sont couverts de motifs en stuc ou en staff du XVIIIe siècle. Des boiseries Louis XV (1769) couvrent la partie inférieure des murs ; lors de leur restauration, en 1999, on a rendu mobile l’un des panneaux pour voir le lavabo gothique. Sur le maître-autel, beau retable en bois doré, de style Louis XV également, avec monstrance et deux anges adorateurs. Une partie de ce riche mobilier passe pour provenir de l’ancienne chartreuse de Sélignat située à quelques kilomètres au sud de Germagnat, mais on a vu précédemment, en abordant l’histoire de cette église, que ces œuvres peuvent aussi provenir du mécénat du curé Jean Grefferat (1738-1777). À l’intérieur de la sacristie, on voit, sur les murs, des inscriptions latines du XVIIIe s., récemment découvertes (1998), se rapportant à la préparation du prêtre avant la célébration de la messe.
Parmi le mobilier, à noter aussi des statues gothiques en pierre de saint Germain et de saint Laurent, malheureusement mutilées, et une statue de la Vierge toujours placée à l’extérieur, au pignon de la sacristie. Tableau de la Pietà (XVIIIe ?).
Cette église a fait l’objet d’une restauration extérieure (murs et toitures de tuiles plates) à laquelle la Sauvegarde de l’Art français a participé en accordant 10 000 € en 2003. La restauration intérieure est en cours.
P. C.
Bibliographie :
Arch. dép. Ain, 3 E 984, 1744, (21 février), et 3 E 984, 1744 (23 février).