Occitanie, Gard (30)
Sainte-Cécile d’Andorge, Eglise Sainte-Cécile
Édifice
Description
L’église se présente sous la forme d’un corps principal (nef et abside) avec deux collatéraux au Nord et au Sud, puis de son clocher sur base carrée, et coiffé d’une toiture à quatre pans en lauze de schiste.
Le clocher au Sud, paraît assez massif par rapport au reste de l’église. Il est composé de trois niveaux. La chambre des cloches est ouverte par deux ouvertures sur chaque façade.
On pénètre à l’intérieur de l’église par une porte à deux vantaux en façade Ouest. Elle se compose d’une nef centrale avec voute plein cintre, son abside polygonale à l’Est, de chapelles latérales au Nord et Sud.
Deux des trois travées du collatéral Nord sont voutés, perpendiculairement à la nef. Il s’agit de l’église d’origine.
La tour clocher serait quant à elle, l’élément d’origine et donc le plus ancien.
La chapelle de la Vierge, niveau inférieur du clocher est d’ailleurs traitée différemment par rapport au reste de l’église. Elle est caractérisée par une voute à croisement d’ogives. Elle est de style gothique. On peut penser à l’hypothèse d’une chapelle d’origine, dans une tour de guet, avec une pièce à l’étage.
Au Nord-Est se trouve la sacristie, accessible depuis l’abside, dans une partie de l’édifice qui a été agrandie à plusieurs reprises.
La partie inférieure de l’abside est recouvert d’un lambris bois.
Toutes les baies de l’église sont ornées de vitraux très rustiques et de différentes factures suivant les époques.
Histoire
La première mention connue de la paroisse de Sancta Céciliae de Andorgia remonte à 1384. La paroisse appartenait à la viguerie d’Alès et au diocèse d’Uzès, doyenné de Sénéchas. L’office ecclésiastique du prieuré dépendait alors de l’évêque d’Uzès mais il était toujours « à la présentation » des seigneurs de Portes.
Si en 1215 le concile de Latran avait retiré aux seigneurs leurs prérogatives sur les églises de leur domaine, en contrepartie ils conservaient certains privilèges, dont le droit de présentation de leurs armoiries sur l’édifice, et au moment de leur mort « le litre funéraire», bande noire placée en hauteur.
Les bénéfices du prieuré (perception de la dîme) tombent dans la bourse de la seigneurie. Ainsi le 11 Juin 1613, Catherine DE CLERMONT, épouse de Jacques DE BUDOS, vicomte de Portes, « ayant charge de prieuré de Ste-Cécile d’Andorge, arrente à noble Antoine D’ AUTUN, seigneur du mas Andrieu, tous les fruits décimaux dudit prieuré … » (1)
Un ancien curé de Sainte Cécile, Georges RAFELIS DE BROVES (1842-1904) à l’origine de la campagne de restauration de l’église de 1882-1887, semblait convaincu de l’origine laïque de l’église de Sainte Cécile puisque il écrivait : « la tour du prieuré, à la fois clocher et donjon, était le siège _d’une justice féodale, et c’est à cause de cela que parfois (chose assez curieuse) les prieurs de Sainte Cécile prirent le titre et revendiquèrent les droits de co-seigneurs de Sainte Cécile … ».
Les Seigneurs de Portes (les Anduze jusqu’au llème siècle) seraient donc à l’origine du prieuré. Par ailleurs, le juge de la seigneurie de Portes siégeait de droit aux assemblées consulaires de Sainte Cécile.
L’allure massive de l’édifice, ses murs épais, lui confèrent l’allure d’une forteresse. L’église n’a-t-elle pas sauvé la vie des villageois quand les troupes camisardes de JOUANY et de ROLLAND ont déferlé sauvagement sur « le village papiste» le 11 octobre 1703, brûlant les maisons et tuant 9 habitants qui n’avaient pas eu le temps de s’y réfugier?
Cette paroisse appartenant aux Cévennes catholiques n’a pas échappé aux antagonismes entre le temporel et le spirituel; et le prélèvement de l’impôt de l’église y resta très impopulaire. Il n’était pas rare que· le curé· doive relancer les consuls pour la réparation de la maison claustrale, du cimetière ou du couvert de l’église.
Ainsi les rapports entre le prieur, le sieur Bouquet et les institutions communales furent souvent conflictuels comme en témoigne le long procès devant le parlement qui les opposa au sujet de « la dîme du millet » ou aussi de « la chaume et du gueret » (semailles de printemps) en 1748. Les habitants en appelèrent à l’ancestrale coutume qui les exemptait, disaient-ils, de payer cette portion de récolte. Le prieur Jean Antoine BALMELLE qui lui aussi entre en conflit au sujet des réparations à faire est assassiné dans la maison claustrale dans la nuit du 16 au 17 août 1771. A la suite de ce meurtre crapuleux, la paroisse fera apposer des grilles en fer à la fenêtre de la dite maison.
Georges RAFELIS DE BROVES (2) quant à lui sembla avoir beaucoup aimé son séjour à Sainte Cécile d’ Andorge. N’écrivait-il pas : « aujourd’hui la tour du prieuré ne confère plus le moindre droit de seigneurie, mais elle a conservé l’aspect qu’elle eut autrefois, et lorsque j’habitais ces lieux vénérables, j’aimais à entendre bruire les vents à travers les grandes baies de ma tour: pendant les nuits orageuses, la cloche vibrait, par intervalle, comme si elle était vivante … »
Dès sa prise de fonction en 1882 le nouveau curé demande au conseil de fabrique de budgétiser la restauration de l’édifice; le premier devis de 31 000 francs prévoit un formidable agrandissement pour les 850 fidèles. Il faut savoir que Sainte Cécile d’Andorge compte 1200 habitants suite au développement de la Grand’Combe et des travaux de chemins de fer. Le PLM dessert en effet la commune depuis 1867. Le second devis présenté en 1884 par l’architecte Dumoulin est ramené à moins de 10 000 francs. Il prévoit d’accroitre la capacité de l’église de 63 m2.
Le plan prévoit la construction de deux chapelles latérales, le transfert de l’entrée principale du côté sud au côté ouest, et l’augmentation du chœur et de l’autel, donnant au fond de l’édifice une forme octogonale. Le devis sera cependant dépassé. Il est réparti entre le conseil de fabrique, les dons de nombreux habitants qui participent à hauteur d’un tiers environ à la dépense, et la mairie.
Georges RAFELIS DE BROVES part en 1887, la nouvelle église vient d’être inaugurée. Le temps de son ministère a donc coïncidé exactement avec celui de la reconstruction de l’édifice qui n’avait jamais connu pareille campagne de restauration depuis les guerres de religion.
Laurent Aiglon, Historien
(1) Seule la partie la plus septentrionale de la paroisse, demeurée réformée, (les Ponchets, Chaurage), dépendait du château de Verfeuil sur la paroisse du Collet de Dèze. Il faut savoir que Verfeuil appartenait à la famille de GRIMOARD dont est issu le pape Urbain V.
(2) L’ecclésiastique est l’auteur de plusieurs ouvrages dont l’idée chrétienne sur le pouvoir publié en 1871-à Lyon chez Aimé VINGTRINIER et une notice sur l’abbé BOISSIER DE SAUVAGES.