Normandie, Calvados (14)
Douville-en-Auge, Église Notre-Dame
Édifice
Eglise Notre-Dame. Non loin de la route qui conduit d’Annebault à Dives, l’église de Douville a été construite au flanc d’un vallon autrefois couvert de forêts que remplacent aujourd’hui de larges pâturages. Au XIVème s., elle avait pour patron le duc de Normandie, le seigneur laïc nommant encore à la cure au XVIème siècle. Placé sous le vocable de Notre-Dame, ce petit édifice orienté a été construit en deux temps au cours des XIIème et XIIIème siècles. C’est un long rectangle, accosté au nord d’une cour de plan carré et terminé à l’est par une abside à chevet plat, masquée par une sacristie de construction récente. Selon Arcisse de Caumont, les trois travées de la nef présentent une structure du XIIème s., bien que les murs aient été remaniés à partir du XVème siècle. Le chœur, assez vaste, puisqu’il est formé de deux travées identiques à celles de la nef, aurait été élevé dans les premières années du XIIIème siècle. Il est séparé de la nef par un arc triomphal légèrement brisé reposant de chaque côté sur deux colonnettes à chapiteaux finement sculptés, posés sur deux larges piliers de section carrée. Le vaisseau est voûté en berceau brisé composé d’un lambris de merrain avec poinçons et entraits apparents. Les croisées d’ogives du chœur sont quadripartites, les arcs formés d’un tore présentant des clés de voûte sculptées. Les deux travées sont séparées par un arc doubleau donc le système de soutien est identique à celui de l’arc triomphal, avec des colonnettes un peu plus importantes. Dans les angles, les arcs côté chevet reposent sur une courte colonne terminée par un cul-de-lampe sculpté d’un côté d’une tête féminine, de l’autre masculine. De l’époque romane, une seule fenêtre subsiste, étroite et en plein cintre, très fortement ébrasée à l’intérieur, à côté d’une porte percée sur le côté sud au XVIIIème siècle. Le chœur ne conserve d’origine que deux fenêtres à lancette qui éclairaient autrefois le chevet et ont été depuis occultées par la sacristie ; les autres ouvertures ont été largement percées au XVIIIème s. pour donner à cette petite église élevée sur un seul étage un éclairage plus lumineux, dans la ligne des nouvelles consignes du concile de Trente qui souhaitait rendre un certain faste au culte. Lors des réfections entreprises récemment dans les murs goutterots, des traces de remplage flamboyant ont été retrouvées sur le mur sud de la nef et une porte en arc brisé a été rouverte sur ce même côté. Sur la façade ouest à pignon triangulaire, surmonté d’une croix en pierre d’origine, ouvre un portail en plein cintre appareillé de claveaux et surmonté d’une archivolte moulurée d’un tore. Sur le côté nord, le clocher qui pourrait avoir été élevé au XVIème ou XVIIème s ., selon A. de Caumont, ou à la fin du XVème, selon M. Pougheol, architecte chargé des travaux de restauration de l’église, abritait à l’origine une chapelle au rez-de-chaussée. Cette chapelle ouvrait par un grand arc brisé sur la nef. Cette ouverture est aujourd’hui murée. Cet espace remplissait peut-être le rôle de chapelle seigneuriale, une litre avec armoiries étant décelable à certains endroits. Une tourelle d’escalier à vis est accolée au pignon nord de ce clocher. De plan barlong à la base, elle s’élève par ressauts successifs et dissymétriques jusqu’à la pyramide du clocher. Des contreforts plats épaulent les murs à l’occident ; ils sont plus épais et couverts d’un glacis aux angles de la tour. Une corniche à petites arcatures géminées court autour du chœur à l’extérieur. Elle est supportée par de remarquables modillons sculptés de têtes humaines et animales grimaçantes et pittoresques. Le décor intérieur de cet édifice est particulièrement riche. Dans le chœur, dissimulée par les boiseries, une piscine datant de l’origine a été conservée. Le mobilier remonte dans l’ensemble aux XVIIème et XVIIIème s. : maître-autel avec son retable dédié à NotreDame, deux autels latéraux également en bois, lutrin et fonts baptismaux. A noter la décoration peinte d’attributs liturgiques des portes donnant accès à la sacristie et la présentation de l’autel qu’il serait intéressant de comparer aux décorations d’une autre église proche, celle de Notre-Dame d’Estrées. Une poutre de gloire en bois au profil finement chantourné est assez inhabituelle dans sa conception. Elle supporte un Christ polychrome du XVIIIe siècle. On ne peut quitter ce site agreste et captivant sans s’attarder non loin d’un if à l’envergure impressionnante et multi-centenaire, près d’une croix dans le cimetière. Sculptée au XVIème s., sur ses deux faces (elle a été classée au titre des Monuments historiques en 1927), elle représente d’un côté le Christ nimbé, et de l’autre la Vierge couronnée. Arcisse de Caumont dit reconnaître au sommet de la croix une couronne ducale bien difficile à distinguer aujourd’hui ; selon d’autres interprétations il s’agirait d’un pélican . Afin de conserver l’authenticité de ce modeste mais précieux édifice et de le préserver des dégradations dues aux intempéries, des travaux de consolidation et de réfection des murs étaient nécessaires, travaux auxquels la Sauvegarde de l’Art Français a participé pour une somme de 75 000 F en 1995.