Centre-Val de Loire, Loiret (45)
Courcelles, Église Saint-Jacques-le-Majeur
Édifice
Le plus ancien document mentionnant la paroisse date de 1123. Les religieux de Saint-Benoît-sur-Loire accordent à ceux de la Cour-Dieu un droit sur les dîmes qu’ils possèdent à Courcelles. Signe de leur puissant ancrage local, les premiers exercent, par la voix de leur abbé, le droit de nomination à la cure, et cela jusqu’en 1709. Ayant, par ailleurs, relevé du diocèse de Sens jusqu’à la Révolution, la paroisse est, depuis l’origine, placée sous le vocable de Saint-Jacques-le-Majeur avec, comme patronnes secondaires, sainte Anne et sainte Apolline.
Le village fut jadis le siège d’une châtellenie royale, d’où le nom de Courcelles-le-Roi qu’il porta jusqu’à la Révolution. Fils d’un bourgeois de Paris, Nicolas de Bracque est anobli en 1339 et reçoit de Philippe VI de Valois le château de Courcelles pour prix de ses services. Il accède par la suite aux plus hautes charges financières du royaume. Ayant acquis une immense fortune, il meurt en 1388, au terme d’une vie riche en péripéties. Son fils Jean connaît à son tour une belle carrière sous le règne de Charles V, dont il est l’un des plus proches conseillers. À son décès, en 1406, Blanchet de Bracque, son fils, lui succède. Il passe pour avoir conçu le projet de reconstruire l’église paroissiale, projet auquel sa mort, intervenue peu après la bataille d’Azincourt, porte un coup fatal.
Suite à un don d’Henri III, la seigneurie passe, au XVIIe s., aux mains des de Birague, famille d’origine milanaise. L’un d’entre eux, Charles de Birague, entreprend de construire, à proximité immédiate de l’église paroissiale, une chapelle hors œuvre dédiée à saint Hubert qui, comme sainte Apolline, fait alors l’objet d’un important pèlerinage, encore très fréquenté au XIXe siècle. Parfois qualifiée de seigneuriale, cette chapelle est consacrée par l’archevêque de Sens en 1656.
Selon l’abbé Bernois, qui se livra à des recherches approfondies au XIXe s., l’église de Courcelles aurait été élevée à la fin du XIIe s., puis agrandie au début du XVe. Si l’examen de ses dispositions actuelles ne conduit pas à rejeter d’emblée ses affirmations, il invite cependant à les nuancer quelque peu et à les compléter, en particulier pour les périodes plus récentes.
L’édifice présente un aspect plutôt austère : sa façade occidentale qui s’ouvre dans un mur-pignon dissymétrique, est dépourvue du moindre décor. Les façades latérales, percées, pour la plupart, de baies en plein cintre, sont rythmées par des contreforts. Couvert d’ardoises, comme le long pan sud de la toiture principale, un clocher hors œuvre, sans grand caractère, occupe l’angle sud-est. Une fois franchie l’une des deux portes d’entrée, l’intérêt du visiteur est éveillé par les dispositions intérieures de la construction. De plan rectangulaire, l’église comporte un chœur voûté de deux travées, à chevet plat, datable de la fin du XIIe ou du début du XIIIe siècle. Il se prolonge par une nef de trois travées, peut-être d’origine romane, couverte au XIXe s. de fausses voûtes en brique et plâtre, à l’image de nombreuses églises du Loiret. La nef est flanquée au sud d’un unique bas-côté, dont les trois premières travées sont couvertes en brique et plâtre comme celles de la nef, tandis que les deux dernières, voûtées en pierre, qui pourraient dater du XVe ou du début du XVIe siècle. Fermée par une grille de communion au XIXe s., comme l’était autrefois le chœur, la cinquième et dernière travée est aménagée depuis cette époque en chapelle de la Vierge.
Si l’on excepte les fonts baptismaux et un remarquable bénitier sculpté en pierre du XVIIe s., les vitraux et le mobilier ne remontent pas au-delà du XIXe siècle. Datant de 1857 ou peu après, un intéressant vitrail commémoratif d’inspiration néogothique occupe l’intégralité de la baie latérale éclairant la chapelle de la Vierge ; il illustre, sans ordre apparent, six scènes de la vie de Marie, comprises chacune dans un médaillon.
Mais beaucoup plus que son décor, somme toute assez réduit, deux particularités, non décelables de l’intérieur, distinguent aujourd’hui Saint-Jacques-le-Majeur de Courcelles des autres églises de la région. Tout d’abord, la présence, dans le prolongement de l’édifice, d’un chœur polygonal inachevé aux dimensions impressionnantes. Composé de deux travées droites et d’un rond-point à cinq pans, il conserve, sur sa face externe, des départs de nervures indiquant qu’un déambulatoire était prévu. Les profils des moulurations et les retombées en pénétration des nervures dans les maçonneries militent en faveur du XVe siècle. Rien ne s’oppose, par conséquent, à ce que Blanchet de Bracque ait été le commanditaire de cet ambitieux programme, dont l’échelle, s’il avait été mené à son terme, aurait été sans commune mesure avec celle des églises paroissiales rurales de la région.
Seconde particularité, la chapelle Saint-Hubert dont il a été question plus haut, qui fut greffée au sud du chœur avorté. De datation incertaine, remanié à plusieurs reprises, ce modeste oratoire vaut surtout pour son remarquable décor peint du XVIIe s., qui a fait l’objet, en 2005, d’une restauration exhaustive. D’inspiration populaire, celui-ci met en scène, outre la légende du saint patron, toute une série de saints guérisseurs (dont sainte Apolline) dans un décor architecturé en trompe-l’oeil.
Après avoir donné, en 2005, 7 000 € pour la restauration de la chapelle Saint-Hubert, la Sauvegarde de l’Art français a à nouveau accordé une aide à la commune en 2011, cette fois de 5 000 €, pour la réfection à neuf de la couverture du clocher de l’église Saint-Jacques-le-Majeur, ainsi que la consolidation de sa charpente et de ses supports maçonnés.
Gilles Blieck
Bibliographie :
Abbé Bernois, « La seigneurie de Courcelles-le-Roi », Annales de la Société historique et archéologique du Gâtinais, t. IV, 1886, p. 28-56.
Abbé M. Gand, « Courcelles-le-Roi », dans Le châtel d’Yèvre : forteresse médiévale, siège de la justice royale, Pithiviers, 1967, p. 23-25.
« Courcelles-le-Roi », Connaissance et sauvegarde du Patrimoine, notice n° 140, Pithiviers, 1997, p. 2-19.
Ph. Chapu, « Courcelles », La Sauvegarde de l’Art français, cahier 20, 2007, p. 42-43.