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Entourée de son cimetière dans lequel les tombes anciennes sont encore nombreuses, l’église de Champdolent, dédiée à la Nativité de la Vierge, s’impose par la silhouette massive de son clocher carré, apparenté à un type largement répandu en Poitou et en Saintonge mais dont les dimensions sont ici assez exceptionnelles. Le contraste est très marqué entre ce clocher, épaulé de puissants contreforts, la longue nef auquel il est accolé et la délicatesse de l’abside, exemple très caractéristique de l’architecture romane de la Saintonge, avec ses contreforts-colonnes et sa corniche soutenue par des arcatures décorées qui reposent elles-mêmes sur des modillons sculptés de motifs dont le répertoire est des plus remarquables.

Cette abside, qui compte parmi les plus belles de la région, est-elle la partie de l’église qui fut achevée en premier et a-t-elle été complétée par étapes successives par un chœur de deux travées qui date certainement du xiie s. (comme en témoigne l’un des chapiteaux, avec son décor de lions), puis par une nef un peu plus large, également de deux travées ? Mais il est aussi possible d’avancer l’hypothèse selon laquelle les murs périmètraux de cette nef, prévus en fonction d’un couvrement en charpente, comme semble l’indiquer le percement de ses fenêtres, situées en partie haute des murs primitifs en assez petit appareil, seraient la partie la plus ancienne de cette église. Cependant cette nef fut sans doute voûtée au cours du xiiie s. comme semblent l’indiquer un chapiteau à décor de feuillage, encore en place, et aussi deux grosses clefs de plan octogonal, actuellement déposées sur le parvis de l’église, qui suggèrent que ces voûtes étaient à huit nervures. La construction de cette voûte entraîna un rehaussement des murs latéraux en bel appareil qui contraste fortement avec celui de la zone inférieure, comme on peut l’observer en particulier à l’extérieur, du côté sud, dans la première travée. La présence sur l’ensemble des murs intérieurs de l’église d’un enduit avec de faux joints ne permet pas toutefois de restituer avec certitude les dispositions d’origine ; les voûtes de la nef furent détruites, peut-être durant les guerres de Religion et lors de leur reconstruction, au milieu du xixs., on décida, pour mieux éclairer la nef, d’utiliser les fenêtres hautes d’origine en créant un modèle de voûtes en berceau légèrement brisé pourvu de « pénétrations » selon un système dont il n’existe, sans doute, que peu d’autres exemples.

Le portail, qui s’ouvre dans une surépaisseur du mur de façade renforcé par deux contreforts plats, est en plein cintre et sans tympan ; il a pour principal ornement un masque humain très stylisé qui forme la clef de la voussure la plus externe, décorée de triangles, la pointe tournée vers l’intérieur de l’arc, motif qui se retrouve sur les arcatures de la corniche de l’abside et dans l’arrondi de l’encadrement extérieur des fenêtres de la nef. La partie supérieure de la façade a été manifestement reconstruite et l’on peut s’interroger sur la date de la croix antéfixe qui la surmonte. A l’extrémité droite de la façade une niche, malheureusement mutilée, a été aménagée dans le contrefort d’angle au début du xvie siècle.

Au cours du xve s., une chapelle fut aménagée, en forte saillie, sur le flanc sud de l’église ; pourvue, sur sa façade occidentale, d’une petite porte extérieure, sommée d’un arc en accolade et aujourd’hui murée, cette chapelle communiquait avec la nef par deux arcs brisés inégaux percés dans le mur sud et retombant sur un pilier circulaire ; celui de gauche est bouché désormais par une niche en plâtre ; les moulures de ces arcs sont à pénétration directe. La partie orientale de cette chapelle, dont la voûte à huit nervures comporte une élégante clef à encadrement ajouré, est utilisée comme sacristie ; dans son angle nord-ouest un ange, porteur d’un blason, sert de console mais son état d’usure ne fournit aucun renseignement sur le constructeur de cette chapelle.

La partie occidentale de cette chapelle et la zone qui la relie à la nef ont été fortement perturbées par la construction du clocher. Celui-ci, qui n’est dans doute pas antérieur au xvie s. a pu jouer un rôle défensif.

Le maître-autel en forme de tombeau est en bois peint en marbres feints. Il pourrait remonter au début du xixe s. et être un bon exemple de mobilier d’église de style néo-classique, antérieur à la généralisation des styles néo-médiévaux.

On peut certes regretter que l’état ancien de l’église de Champdolent ait été en partie masqué par les interventions du xixe siècle. Mais elle demeure un bel édifice, avec une abside véritablement remarquable. L’état de vétusté de la charpente du clocher qui avait, en 2003, entraîné la fermeture du chœur par une cloison, avait été aggravé en par l’effet d’une tempête en juin 2013 ; une intervention d’urgence s’imposait pour préserver cette partie de l’édifice dont l’importance est considérable dans le paysage de ce site de la vallée de la Boutonne. La Sauvegarde de l’Art français a accordé 7 000 € en 2015 pour la restauration de la couverture et de la charpente, et pour des reprises ponctuelles de la maçonnerie du clocher.

 

Jean-René Gaborit

Le projet en images