Occitanie, Aude (11)
Bagnoles, Église Saint-Paul-et-Saint-Serge
Édifice
Paul de Narbonne, appelé aussi Paul-Serge, est le premier évêque de Narbonne, au IIIe siècle, contemporain de prélats évangélisateurs de la Gaule comme Trophime, Austremoine ou Saturnin. Son culte est célébré dans la collégiale narbonnaise éponyme, bien connue des historiens de l’art. Cette dédicace est aussi celle de nombreuses églises des diocèses de Narbonne et Carcassonne et signe peut-être des paroisses très anciennes. C’est le cas de Bagnoles (villa Baniolas, 1119, en occitan contemporain Banholas), village situé à 9 km au sud-ouest de Carcassonne.
Comme le village de Trausse, Bagnoles est une seigneurie dépendant de l’abbaye bénédictine de Caunes-Minervois, qui en possédait cinq, dont le bourg de Caunes lui-même. Seigneur et décimateur, c’est à elle que revenait d’entretenir — ou de reconstruire — l’église, comme d’en nommer le curé, avec l’accord de l’évêque de Carcassonne, comme on le voit en 1301[1]. Un plan dressé en 1791 indique très clairement au centre du village l’emplacement du château, ou fort, entouré de fossés, incluant le presbytère et une maison de l’abbé de Caunes. L’église se trouve juste à l’extérieur de l’enceinte, en face de la tour située au centre du fort, toujours conservée.
Cet petit édifice est une église romane à l’origine, simple nef unique non voûtée, ensuite agrandie vers l’est, avec une travée comportant deux chapelles latérales formant une sorte de faux transept et une abside polygonale voûtée sur croisée d’ogives. La partie romane s’observe sur la façade sud, où s’ouvre un portail en plein cintre appareillé en grès rouge. Les vantaux de la porte sont datés de 1856. Au-dessus de l’arc de la porte, est inséré un bas-relief en grès également médiéval, portant une croix en faible relief dans un cercle. Un peu au-dessus, à gauche, on voit une fenêtre bouchée, correspondant elle aussi à ce premier état roman. Sur les claveaux de l’arc du portail, on voit quelques traits correspondant à un cadran solaire minimal[2], substitué plus tard par un cadran en enduit, que le décroutage des murs de l’édifice a épargné, mais qui n’est plus lisible. Contre le mur pignon ouest, un petit clocher qu’il est difficile de dater apparaît composé de deux parties : un fût carré à peu près aussi haut que l’église, surmonté d’un autre fût légèrement en retrait. Il est sommé d’un petit campanile en fer forgé abritant la cloche des heures, tandis qu’au dernier étage des baies ouvertes accueillent les cloches des sonneries liturgiques. L’accès à la tour se fait par un escalier extérieur, menant directement à l’étage, la partie basse correspondant à la chapelle des fonts baptismaux ouverte dans le fond de la nef.
A l’intérieur, l’édifice apparaît divisé en trois travées, couvertes de fausses voûtes d’ogives en briques et en plâtre, dont l’une porte à la clé le millésime 1863 : l’église de Bagnoles ayant été érigée en succursale en 1861, il est probable qu’elle a fait l’objet d’une modernisation à cette occasion. La troisième travée est bordée de deux chapelles au nord et au sud, très modestes : celle du nord, voûtée[3], dédiée à saint Roch, celle du sud, simplement plafonnée, à la Vierge, avec un élégant retable en gypserie néo-classique. Cette travée précède un sanctuaire de plan polygonal, couvert d’une voûte à cinq compartiments dont la clé est décorée de motifs trilobés. On remarquera, trait commun à beaucoup d’églises du Minervois ou de l’Aude en général, un beau mobilier en marbre, sans doute du 18e siècle : maître-autel (tombeau en marbre gris et incarnat), fonts baptismaux, chaire à prêcher néo-classique avec une belle polychromie.
En 2016, la Sauvegarde de l’Art français a accordé un don de 8 000 € pour la réfection de la toiture.
Olivier Poisson
Notes
[1] Coste, L., Bagnoles hier et aujourd’hui, Carcassonne, 1985.
[2] Dispositif répété sur le piédroit gauche de la fenêtre romane bouchée.
[3] La clé de voûte de cette chapelle porte un blason avec des lettres et des chiffres, que l’empâtement des badigeons ne permet pas de déchiffrer à l’œil nu.