Effiat, antiphonaire

Cette œuvre a été sélectionnée par les salariés de l’usine Michelin de Clermont-Ferrand (63) dans le cadre de la campagne Le Plus Grand Musée de France 2024. Elle va bénéficier d’un mécénat de 8 000 € offert par la Fondation d’Entreprise Michelin pour sa restauration.

La commune

Située au nord du département, la commune d’Effiat a été marquée par l’apport et l’influence d’Antoine Coëffier de Ruzé, marquis d’Effiat au cours début du XVIIe siècle. Ce proche de Richelieu ambitionne de faire d’Effiat une cité nouvelle. Sa mort prématurée en 1632 empêche ce projet de voir le jour, mais un ensemble patrimonial digne des belles constructions du Grand Siècle, et remarquable pour le Puy-de-Dôme, est néanmoins construit par des architectes venus de Versailles : le château (rénové entre 1626 et 1628), la maison de l’Oratoire (collège jésuite fondé en 1627), l’hôpital des Frères de la Charité (actuelle maison de retraite, édifiée entre 1642 et 1645) et l’église Saint-Blaise (utilisée aussi comme chapelle du collège de l’Oratoire) édifiée à partir de 1632. 

L’église Saint-Blaise

 L’église Saint Blaise constitue un rare témoin de cette grande architecture classique religieuse dans le département. Ce patrimoine fait aujourd’hui l’objet d’une attention toute particulière de la municipalité d’Effiat qui souhaite engager une restauration de l’ensemble de l’édifice. Ce projet d’envergure est l’occasion de s’intéresser à l’important ensemble mobilier religieux, inventorié en 2016 par la Commission diocésaine d’art sacré et au sein duquel subsiste des éléments témoins de cette prestigieuse histoire effiatoise. C’est notamment le cas d’un très beau livre de chants, ou antiphonaire, imprimé en 1656. 

L’oeuvre

Les antiphonaires sont des livres utilisés pour la liturgique catholique depuis le haut Moyen âge : ils rassemblent les partitions des chants et psaumes interprétés aux heures canoniales. Les exemplaires les plus anciens de ces ouvrages sont conservés dans des institutions patrimoniales. Les églises paroissiales conservent quant à elles majoritairement des ouvrages du 19e siècle, parfois du 18e siècle. À Effiat, c’est un ouvrage imprimé en 1656 (les textes ont été approuvés en 1635), soit en pleine période de renouveau catholique après les Guerres de religion, qui a été remis au jour. Il s’agit d’un rare témoin de cette période encore conservé sur place et que l’on peut rattacher à l’influence prestigieuse du marquis d’Effiat. 

Il s’agit ici d’un livre dont les textes et chants ont été publiés sur ordre des papes Clément VIII (1536-1605) puis Urbain VIII (1568-1644), tous deux proches de Philippe Néri fondateur de la congrégation de l’Oratoire. Philippe Néri était le directeur de conscience et le confesseur du pape Clément VIII, et c’est à Urbain VIII que l’on doit l’officialisation par bulle papale de sa canonisation. Cette mention portée en début de l’ouvrage rattache indiscutablement l’antiphonaire à la présence des oratoriens à Effiat dès 1627 et l’usage de l’église comme chapelle de la congrégation. 

L’ouvrage est imprimé sur un papier de très belle qualité. La gravure en frontispice a disparu (il s’agit probablement d’un larcin), mais nombre de chants débutent par des petites gravures illustratives, à la manière d’enluminures médiévales. 

La restauration

Les cahiers sont reliés entre eux par couture et renforcés au dos des « nerfs » (petits bâtons collés au dos), selon une technique mise au point au XVIe siècle. Les plats de reliure protégeant les cahiers sont constitués de plusieurs couches carton épais collées entre elles et recouvertes de cuir.

La rareté de cet objet dans une église paroissiale mérite de lui donner une place particulière dans le projet de valorisation du patrimoine effiatois : une fois les travaux de restauration de l’église achevés, l’antiphonaire y sera exposé, sous vitrine. 

Mais avant cela, il a besoin d’une restauration en profondeur : bien que les pages soient toutes conservées et en plutôt bon état, il pâtit de l’environnement humide et poussiéreux dans lequel il a été entreposé depuis les années 1835, remplacé alors par des exemplaires plus récents. Des traces de moisissures altèrent les bordures et la reliure est très endommagée : les cartonnages se décollent, le cuir est sec et cassant, les coutures et nerfs du dos sont visibles à l’œil nu.