Nouvelle-Aquitaine, Lot-et-Garonne (47)
Anthé, Église du château Sainte-Foy
Édifice
L’église castrale du château de Sainte Foy d’Anthé est implantée sur le pech éponyme, face au fameux village de Cazideroque connu pour son « tort langue » réputé dans toute la Gascogne (« Cazideroque est si bien implanté en Cazideroquie que celui qui le décazidéroquera sera décoré de la décazidéroquérature »).
L’église romane du XIème siècle est construite en moellons de calcaire typiques du Quercy blanc. Elle possède une nef unique ouvrant sur un choeur à chevet semi-circulaire. Elle est coiffée d’un mur-clocher percé d’une baie campanaire comportant une belle grosse cloche datée de 1811 et sur la jupe de laquelle est inscrite la dédicace : « Que le nom du Seigneur soit béni « . Elle siège au milieu d’un enclos constitué de murs de pierres de calcaire blanc de l’Agenais possédant en son centre un magnifique chêne identifié comme remarquable dans le Lot et Garonne. Cet enclos paroissial est l’ancien cimetière de cette église qui fût une des trois paroisses d’Anthé jusqu’en 1792 date de sa fermeture par les constitutionnels.
Au moment de sa vente comme « bien national », le 21 frimaire an VII (mardi 11 décembre 1798) le rapport sur l’état des églises du canton la présente : « en très mauvais état ainsi que les lambris et les murailles basses ». Marie Françoise de Chasteignier ancienne sœur du couvent des Annonciades de Villeneuve sur Lot, dernier membre de la puissante Maison de Chasteignier seigneur de Sainte Foy, la fit racheter par un prête-nom, Jean Guillaume Dubruel bourgeois de Tournon d’Agenais, lors de sa vente comme bien national car tous ses ancêtres reposaient dans le caveau familial de son choeur. Son oncle Monseigneur Germain de Chasteignier y fut enseveli en 1781.
Les Marabal la rachetèrent avec le château en 1811 et la restaurèrent. Ils transformèrent, sous la Restauration, le cimetière paroissial en jardin clos de haies tout en y installant une grande croix commémorative en bois afin que les tombes soient respectées. Le 13 mai 1841, Monsieur le curé Borel, chapelain du château de Sainte Foy et curé d’Anthé, érigea en présence des propriétaires et de nombreux témoins le chemin de la croix, suivant la dévotion que venait d’instituer, en 1839, le pape Grégoire XIII. Ce chemin de la croix ainsi que le PV d’érection original, signé du chapelain, des propriétaires et des témoins, est toujours visible sur les murs de la nef de l’église.
Cette église est connue dans l’histoire régionale depuis le 12 novembre 1271 où elle est citée dans l’acte en latin médiéval dit du « Saisimentum comitatus Tholosani ». Cet acte signé entre le roi de France Philippe III Le hardi, deuxième fils du roi saint Louis, et les bourgeois de la baillie de Tournon d’Agenais, représentés par leurs consuls, énumère les 28 paroisses de la baillie dont Santa Fé (Sainte Foy).
L’église et le pech doivent leur nom à l’épopée rocambolesque du moine Arosnide qui vers 867, se cacha durant un mois sur le pech de Sainte Foy pour échapper à ses poursuivants, lors de la « translation furtive » ou « pieu larcin » des reliques de Sainte Foy de la crypte de l’église d’Agen à l’abbaye Saint Sauveur de Conques (qui deviendra Sainte Foy de Conques suite à cet événement). Elle fut construite au XIème siècle sur les terres du seigneur gascon de Sainte Foy qui prêta une terre à un groupe de moines de l’abbaye de Conques pour y édifier une église. A cette époque cette abbaye envoyait des groupes de moines pour créer des paroisses dans toute l’Aquitaine. Une légende raconte qu’un souterrain reliait l’église au prieuré des moines, situé à 800 m au sud, dans un vieux manoir nommé Hermita. Ce souterrain servait aux moines pour s’échapper en cas d’attaque et pour y cacher le trésor de l’église.
Elle fut détruite lors des guerres de religion, par les bandes de béarnais de la reine Jeanne d’Albret (mère d’Henri III de Navarre, Henri IV de France). En 1601 l’évêque d’Agen, Monseigneur Nicolas de Villars, lors de son inspection épiscopale la décrit en ruines par le fait des guerres de religion. En 1633 elle est toujours décrite en ruines lors d’une visite pastorale.
Elle fut reconstruite en 1635, en version plus modeste, par le seigneur de Sainte Foy, Marc Melchior de Chasteigner. Monseigneur Germain de Chasteigner, issu de l’illustre Maison chevaleresque des Chasteigner du Quercy, fut baptisé le 23 mai 1712 dans le chœur de cette église. Homme célèbre de la famille de Chasteigner, qui resta seigneur de Sainte Foy durant trois siècles, il fut aumônier du roi Louis XV qui le fit sacrer évêque en 1763 dans la chapelle royale du château de Versailles.
Le cimetière servit jusqu’au début du XIXème siècle ; la dernière personne qui y fut inhumée en 1805, fut l’ouvrier meunier du moulin de Sainte Foy sur le Boudouyssou. Cette anecdote fut rapportée oralement au début du XXème siècle par une vieille servante du château. L’église fut restaurée, par les nouveaux propriétaires, entre 1979 et 1985. Ils regroupèrent pieusement les restes des tombes du cimetière paroissial dans le caveau des Chasteignier au milieu du chœur de l’église de Sainte Foy, sous une grande et belle pierre tombale gravée.