En 2024-2025, notre programme lycéen du « Plus Grand Musée de France » prend encore de l’ampleur !

Cette année, ce sont pas moins de 13 classes de lycée dans 8 régions qui se sont embarquées à la découverte de leur patrimoine local. Depuis sa création en 2018, le programme lycéen a désormais essaimé dans toutes les régions de France.

Mais 2025 rime surtout avec innovation, puisqu’en janvier nous avons inauguré avec beaucoup d’enthousiasme une version augmentée de notre campagne, enrichie d’un tout nouveau « volet création » grâce au mécénat de la Fondation TotalEnergies. Outre le programme habituel de visites et recherches autour du patrimoine local, quatre classes de lycées à Dijon (Côte-d’Or), Lucé (Eure-et-Loir), Rethel (Ardennes) et Ahun (Creuse) ont la chance d’allier la théorie à la pratique en bénéficiant également d’un atelier d’initiation à la restauration d’art et de deux ateliers de pratique artistique. Animés par des professionnels au sein même de leur classe, ces ateliers visent à approfondir par la pratique la réflexion des jeunes sur les enjeux de conservation-restauration du patrimoine, en les glissant d’abord dans la peau (et les mains) d’un restaurateur, puis d’un artiste travaillant autour de la notion de patrimoine.

L’expérimentation a donc commencé en janvier avec les ateliers d’initiation à la restauration, qui se sont déroulés dans chaque classe sur une demi-journée. Les supports et spécialités de restauration variaient selon les classes : à Dijon et Ahun, les élèves ont joué les restaurateurs de tableaux, tandis que les jeunes de Lucé ont travaillé sur des sculptures et ceux de Rethel sur des documents anciens.

Retour sur une opération cousue main, au succès retentissant !

À RETHEL, PATRIMOINE ÉCRIT, DÉPOUSSIÉRAGE & REPRISE DE DÉCHIRURES

Au lycée agricole de Rethel, c’est une classe de Seconde générale en grande majorité féminine (2 garçons sur 21 élèves !) qui découvre aujourd’hui un volet moins connu de notre patrimoine : le patrimoine écrit. Morgane Pieters, restauratrice de livres anciens et documents graphiques basée à Charleville-Mézières, commence par définir les différentes formes de patrimoine écrit et ses évolutions au cours de l’histoire, du papyrus à la pochette de vinyle en passant par le codex ou l’affiche publicitaire. Les élèves se font passer des livres anciens reliés de cuir issus de la collection personnelle de la restauratrice – notamment ce traité d’un maréchal-ferrant datant du XVIIIe siècle, qui tombe à pic face à des lycéennes pour la plupart en option hippologie-équitation.

Puis c’est l’heure tant attendue de la pratique. Les élèves se voient attribuer chacune une petite gravure sur papier du XIXe siècle. Première mission : établir un constat d’état qui liste toutes les caractéristiques de l’œuvre (titre, matière, technique, auteur…) ainsi que ses altérations (moisissures, déchirures, altérations de surface/structure…). Après analyse, Morgane montre aux élèves comment effectuer les premières opérations de dépoussiérage et de gommage, avec des gommes spécifiques. Puis vient la réparation de déchirure à l’aide de papier japon, opération particulièrement délicate où les élèves apprennent à mesurer leurs gestes. Le silence se fait dans la salle à mesure que la concentration augmente…

Verdict ? À la question « Qu’est-ce qui vous a le plus plu dans cet atelier ? », Léane répond avec entrain : « Tout ! Je suis fière de moi parce que c’est la première fois que je fais quelque chose d’aussi artistique. » Un enthousiasme partagé par la restauratrice : « Le principe même du métier de restaurateur est de transmettre des œuvres pour les générations futures ;    venir   faire   cet atelier avec les lycéens coulait donc de source pour moi. Cela permet de sensibiliser les plus jeunes à la fois au patrimoine mais aussi aux métiers qu’ils ne connaissent pas forcément, les « métiers de l’ombre » de la culture. » Elle s’est dite ravie de participer à ce qu’elle qualifie de « moment    privilégié    avec   des   jeunes dynamiques et curieux, heureux de voir les résultats concrets de leurs actions ».

À Rethel, apprentissage de la restauration de livres anciens et de gravures avec Morgane Pieters

À LUCÉ, UNE ÉLÈVE TROUVE SA VOCATION DANS LA RESTAURATION DE SCULPTURES

Au lycée Elsa Triolet de Lucé, tout près de Chartres, tout est prêt pour que les 30 élèves de Seconde professionnelle en Métiers de la Relation Client s’initient à la restauration de sculptures. Agathe Houvet, professionnelle basée à Lucé, explique d’abord les bases de la conservation-restauration : « Il y a d’abord la conservation, où on intervient surtout sur le contexte des œuvres : faire en sorte qu’elles soient conservées dans les bonnes conditions, qu’elles puissent ne pas se dégrader dans le temps. Et puis quand c’est trop tard, qu’elles sont déjà dégradées, là on passe à la restauration : des interventions sur la surface – dépoussiérage, nettoyage, refixer la peinture… –  et sur la structure de l’œuvre. »

Côté pratique, les élèves se répartissent ensuite en trois ateliers tournants pour expérimenter quelques gestes et techniques de restauration, grâce aux outils apportés par Agathe :

  • Avec l’atelier de retouche peinture, ils testent différentes teintes de peinture et les font sécher pour trouver la nuance exacte nécessaire aux retouches
  • Puis, à l’atelier collage, ils travaillent sur de petites statuettes brisées dont ils doivent minutieusement recoller les morceaux afin de reconstituer l’objet d’origine
  • Enfin, à l’atelier moulage, les élèves se concentrent sur le nettoyage de pièces en plâtre provenant du musée des Beaux-Arts, en appliquant notamment un gel à base d’argile.

Une initiation dynamique et variée dont tout le monde ressort conquis. Des étoiles dans les yeux, Becky confie qu’elle a « adoré découvrir ces techniques de restauration. Ça pourrait être un plan B si je souhaite changer de métier, car cela m’a beaucoup plu ! »

Jana, quant à elle, confie « avoir une autre vision de ce métier. C’était très agréable de me concentrer sur le nettoyage du plâtre. »

Au lycée Elsa Triolet à Lucé, apprentissage de la restauration de sculptures avec Agathe Houvet

À DIJON ET AHUN, DÉCRASSAGE & PAPIER JAPON SUR DES TABLEAUX DE BROCANTE

Quant à la restauration de tableaux, ce sont nos deux classes de lycée professionnel à Dijon et Ahun qui s’y attellent (lycée Hippolyte Fontaine à Dijon et lycée agricole d’Ahun). À Dijon, Françoise Le Corre projette aux élèves des exemples saisissants d’avant/après restauration qu’elle a pu mener au cours de sa carrière, puis explique les notions de repeint ou de repentir en peinture. Côté Ahun, Sarah Albrand investit le CDI du lycée et passe rapidement à la pratique face à des élèves particulièrement attentives et minutieuses. Pour chaque atelier, des petits formats de tableaux ont pour la plupart été achetés en brocante spécialement pour l’occasion, afin que les élèves puissent travailler dessus en binômes. Après l’indispensable constat d’état initial, les élèves suivent le geste précis des restauratrices pour enrouler finement un morceau de coton autour d’un bâtonnet. En le trempant dans une solution au citrate d’ammonium dont Françoise Le Corre teste devant eux le pH (« ni troc acide, ni trop basique : être restaurateur c’est aussi faire de la chimie, il faut tester ses solutions ! »), les élèves s’essaient au patient décrassage de la couche picturale. L’effet est immédiat et « tellement satisfaisant ! », s’exclame l’une des élèves de Dijon face au ciel de sa toile, qui passe du gris au bleu en quelques applications. À Ahun, la restauratrice s’amuse devant une élève qui en redemande : « Tu peux t’arrêter tu sais, tu travailles en continu depuis tout à l’heure ! »

Après le décrassage, les élèves passent au refixage : à l’aide d’un pinceau souple et d’une colle naturelle, ils appliquent délicatement des morceaux de papier japon sur les zones de soulèvement de la couche picturale. À Dijon, les gestes d’Arthur deviennent de plus en plus délicats au fil de l’atelier, et les bavardages ambiants se dissolvent peu à peu dans la concentration. Pour finir, les élèves d’Ahun ont même le temps de procéder à un léger masticage, spatule en main, pour combler les pertes de matière de la couche picturale, tandis que ceux de Dijon observent les repeints sous une lumière UV.

Au lycée agricole d’Ahun, la restauratrice Sarah Albrand montre aux élèves les premiers gestes de décrassage d’une toile
Au lycée Hippolyte Fontaine de Dijon, une élève reproduit le geste montré par la restauratrice Françoise le Corre

des élèves ravis, un projet réussi !

De Rethel à Dijon en passant par Ahun et Lucé, le résultat est donc unanime : nos lycéens ressortent de ces ateliers pleins d’enthousiasme, avec non seulement une première compréhension du métier de restaurateur – dont ils ne connaissaient pour la majorité pas même l’existence —, mais surtout la fierté d’avoir accompli quelque chose de leurs mains.

Prochaine étape du voyage sur les routes du « Plus Grand Musée de France » : les ateliers de création artistique en février-mars avec un photographe, une comédienne, un écrivain et une vidéaste !