Focus sur une restauration : La Remise des Clés à saint Pierre
Mercredi 21 octobre, les deux CAOA de l’Oise Marie-Bénédicte Astier-Dumarteau et Richard Schuler; l’équipe municipale d’Orry-la-Ville; Mathieu Deldicque, conservateur au musée Condé du château de Chantilly et Constance Calderari, étudiante engagée pour la restauration de La Remise des Clés à saint Pierre ont été conviés à une visite de l’atelier de la restauratrice Florence Adam à Chantilly afin de suivre l’avancée de la restauration d’une toile pour le moins énigmatique.
Pendant / avant la restauration
Découverte de La campagne étudiante en 2017
C’est dans l’église Notre-Dame d’Orry-la-Ville que deux étudiantes engagées dans la campagne du Plus Grand Musée de France, Constance Calderari et Léa Rodriguez, ont découvert en 2017 ce tableau figurant la remise des clés du Paradis à saint Pierre par le Christ. Cette découverte a été rendue possible grâce au travail de recherche et de recensement des œuvres mené en préparation des expositions « Heures Italiennes » conçues par l’association des conservateurs des Hauts-de-France et les musées de la région. La toile d’Orry-la-Ville a alors été désignée comme une œuvre majeure de la production italienne conservée dans l’Oise. Les efforts pour mettre en lumière cette toile ont permis d’obtenir l’inscription de l’œuvre aux Monuments Historiques l’année dernière.
Une œuvre mystérieuse conservée dans l’église d’Orry-la-Ville
La provenance de l’œuvre constitue toujours une énigme. Située à quelques kilomètres de Chantilly et de Senlis, Orry-la-Ville est proche de lieux ayant vu s’épanouir la vie artistique et comptant avec le château de Chantilly de grands collectionneurs, à l’image du Duc d’Aumale qui constitua une remarquable collection de peintures italiennes au XIXème siècle. Don, ou commande pour l’église ? Il est difficile de retracer le parcours de cette œuvre anonyme jusqu’à l’église Notre-Dame. Bien que son auteur reste inconnu, une étude préalable a permis de déterminer que La Remise des clés à saint Pierre est bien un original et aurait probablement été produit en Italie du Nord au XVIème siècle.
L’historien d’Art Jean-Christophe Baudequin avait émis l’hypothèse d’une attribution au peintre Guglielmo Caccia, dit Moncalvo (1568-1625) – peintre tardo-maniériste – en raison de la similitude de la palette chromatique avec d’autres œuvres de l’artiste piémontais. Après avoir reçu les photos du tableau nettoyé, l’historien de l’Art ne confirme cependant pas cette piste d’attribution. Les débats vont donc reprendre de plus belle maintenant que l’œuvre est nettoyée. D’autres spécialistes consultés hésitaient entre l’école vénitienne et l’école lombarde. Leur avis sera recueilli à nouveau après la restauration.
Rendre son éclat à une peinture italienne du XVIème siècle
La première étape de restauration s’est fait en début d’année 2020 dans l’atelier d’Emmanuel Joyerot pour le rentoilage de l’œuvre. L’ancien support affaiblissait la structure générale et cette étape était nécessaire pour garantir un support stable à l’œuvre et la retendre.
Le travail d’analyse mené dans l’atelier de Florence Adam a permis de documenter les précédentes campagnes de restauration par exposition sous lumière du jour et ultraviolette. La couche picturale était recouverte d’un épais vernis jauni, altérant la perception des couleurs initiales. D’anciennes restaurations, en particulier sur les drapés, laissaient entrevoir des repeints débordants sur la couche picturale et des mastics posés pour combler les manques causés par un affaiblissement de la toile, qui a provoqué des
déformations et plus tard des lacunes.
Le travail de dépoussiérage et décrassage conduit par l’atelier a permis de révéler spectaculairement les couleurs ternies par le temps de la toile d’Orry-la-Ville. À ce stade de la restauration, les repeints ont été dégagés et les manques réintégrés en respectant la couche picturale.
Les prochaines étapes de la restauration sont la poursuite de l’intégration picturale sur les lacunes et enfin le dépoussiérage et cirage du cadre. Ainsi restaurée, La Remise des Clés à saint Pierre pourra retrouver son emplacement d’origine pour le plus grand plaisir des Orrygeoises et Orrygeois, et nous l’espérons de tous nos lecteurs !