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Église Saint-Robert de Selgues. L’église est citée dès 1070 parmi les possessions de l’abbaye de La Chaise-Dieu, qui, à cette extrémité occidentale du Rouergue et aux marges sud-orientales du Quercy, avec Saint-Robert de Privezac, Lunac, Castanet, Mazerolles, Saint- Peyronis, tracent la voie jusqu’à Saint-Théodard de Montauban, abbaye rattachée, et jusqu’à Villemur, atteignant la plaine du Tarn et de la Garonne. Elle est mentionnée dans des testaments de 1459 et 1468. En 1510, le prieuré est uni à celui de Privezac dans le diocèse de Rodez ; avant 1718, il est érigé en prieuré-cure. C’est encore le cas en 1789 : son desservant est alors l’abbé Clapié, prieur-curé ; plus tard, l’église devint annexe de la paroisse voisine de Ginals.

L’édifice, aujourd’hui au lieu-dit fort retiré de Sol-de-Fraisse, surplombe le ravin creusé par un affluent du ruisseau de Seye, à peu de distance à travers bois de l’abbaye cistercienne de Beaulieu-en-Rouergue. Le lieu n’est pas sans importance au cœur du Moyen Âge. Les vicomtes de Saint-Antonin, en 1208, y possèdent des biens. En 1253, l’enquête menée par Édouard de Villars, sénéchal de Beaucaire, et Robert Ferré pour le compte du roi de France, afin de rechercher les biens qui lui étaient échus à Saint-Antonin en vertu du traité de Paris, fait figurer Selgues dans cette liste. Une famille de ce nom détient la seigneurie au XIVe et au XVe s. (Jean de Selgues, seigneur de Selgues et de Lunac, est cité en 1392, 1397 et 1412, selon Moulenq), avant que celle-ci ne passe à la maison de Maffre. C’est sans doute le nom d’Antoine de Maffre qu’il faut lire, très effacé, avec son épitaphe et ses armoiries, à la date de 1612, sur une pierre tombale placée dans l’église. Antoine de Maffre fit hommage au roi en 1607 pour la seigneurie et son château.

 

La visite effectuée en avril 1739 au nom de Mgr de Saléon, évêque de Rodez, décrit une situation plutôt contrastée : au bon état relatif de l’autel, du tabernacle, de l’orfèvrerie et des ornements, ainsi que des bâtiments (« le sanctuaire est voûté et en bon état, il est séparé de la nef par un balustre », « la nef est lambrissée, le pavé doit être refait à neuf » et « les murs sont assez blancs ») s’opposent les contestations nées autour de la personnalité du curé, Jean-Louis Besse, 55 ans, dont le comportement est très indépendant.

L’église, couverte de tuiles creuses et bâtie en moellons de calcaire cassés au marteau liés par un solide mortier, ne comporte qu’un seul vaisseau. Les caractères traditionnels et la tonalité d’ensemble méridionale, fidèles à l’héritage préroman et s’appliquant tout particulièrement aux anciens prieurés ruraux, sont ici très lisibles. La séparation est bien affirmée entre le chœur et la nef, moins étroite ; l’arc triomphal, massif, accuse un fort resserrement. Le clocher-mur, à une seule baie, a pris place à l’ouest ; les fenêtres à linteau en plein cintre sont étroites et haut placées. L’édifice remonte au plus tard au début du XIIe siècle ; victime de la guerre de Cent Ans, il a fait l’objet d’une reconstruction et d’une remise en état dont témoigne la voûte d’ogives du chœur datant du XVe siècle. La nef est couverte d’un plafond mentionné en 1669 et en 1739 (à l’occasion de visites pastorales), remplaçant une voûte en berceau plus ancienne, dont on voit quelques vestiges. Des restaurations plus récentes sont encore soulignées et datées, au portail, par des inscriptions de 1782 et 1878.

L’autel de pierre rose et le tabernacle en bois peint et doré à décor de faux bois polychrome et de guirlandes, avec les symboles liturgiques et un agneau mystique sous le triangle de la Trinité, complété par un dais du XIXe s., appartiennent à la deuxième moitié du XVIIIe siècle. L’abondance du mobilier liturgique en étain (qui comprend notamment un plat de quête du XVIIe s.) mérite une attention particulière. Il s’y ajoute un encensoir en métal argenté du XVIIIe s., un calice de la première moitié du XVIIIe s. en bronze et argent doré. Un tableau signé et daté Blazy, en 1813, représente saint Robert de Molesme, rappelant ainsi les vénérables origines monastiques du petit édifice.

La Sauvegarde de l’Art français a accordé une aide de 8 000 euros en 2006 pour les travaux de restauration et de drainage.

Paul Mironneau

 

Le projet en images