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Dédiée à saint Charles Borromée, saint vénéré lors des épidémies de peste des XVIIe-XVIIIe s.[1], fondée par Charles de Percy et autorisée par l’évêque de Bayeux, Joseph-Dominique de Cheylus, cette église en forme de croix latine (longueur 40,5 m) avec un clocher coiffé d’une toiture à l’impériale (hauteur 25 m), date de 1778, selon Arcisse de Caumont[2] qui donne une très brève analyse de cette église « moderne », en précisant qu’à l’intérieur « tout le chœur et les transepts sont revêtus d’une riche décoration en style rocaille » ; il rapporte par ailleurs l’inscription de la cloche « Marie-Antoinette », bénite en 1816[3].

Le bâtiment, imparfaitement orienté, tout en granit et en schiste, est précédé par une imposante tour-clocher carrée, avec chaînages verticaux en grosses pierres de taille grises, mais fragilisée, dès l’origine, par l’absence de chaînages horizontaux. La nef débouche sur un transept, doté de portes à l’est ; le chœur à pans coupés fut, dans les années 1830, habilement prolongé par une sacristie de même hauteur et de mêmes pierres.

La nef, éclairée par huit fenêtres rectangulaires, a rapidement présenté des problèmes de stabilité. Dans les années 1830-1850, on établit quatre contreforts (« piliers buttants ») pour soutenir le mur sud, ainsi que des tirants métalliques (très en vogue alors) pour contenir la poussée des murs gouttereaux fondés dans un mauvais terrain argileux. En 1839, il fallut assécher le cimetière[4] : les déformations de l’édifice menaçaient désormais du côté nord. En 1858, le conseil municipal refusa de financer la construction de contreforts le long du mur (« côtière ») nord, que réclamait le conseil de fabrique, mais décida de réparer le beffroi lézardé. Après plusieurs expertises, il fut enfin décidé, en 1860, d’épauler le flanc nord par trois contreforts.

Par la suite, il fut surtout question de réparations à la toiture ; ainsi, en 1935, le maire demanda-t-il au ministre des Beaux-Arts une subvention dans ce but « attendu que l’église possède cinq toiles classées qui risquent d’être détériorées » ; le préfet fit savoir que « la participation financière de l’État, si elle était attribuée, ne saurait être que fort minime, vu la modicité des crédits inscrits au budget des Beaux-Arts et la possibilité de protéger les tableaux en les déplaçant simplement »[5]. Réponse désinvolte puisqu’il s’agissait de toiles, classées en 1911, appartenant aux cinq retables de l’église : la Peste de Milan dans le chœur, mais aussi l’Éducation de la Vierge, l’Assomption dans le transept, Sainte Thérèse d’Avila et la Mort de saint François d’Assise dans les autels latéraux de la nef.

Les violents combats de la Libération (août 1944) endommagèrent le clocher et soufflèrent les vitraux. La toiture du clocher fut encore abîmée par la tempête de décembre 1990.

L’église a reçu un classement le 13 octobre 1958 pour les parois du chœur et du transept présentant un rare décor en stuc, puis a été inscrite à l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques par arrêté du 18 août 2006. Cette inscription a été décisive pour réunir les subventions nécessaires à la réalisation des travaux pour la consolidation du clocher (2009-2010)[6]. À l’occasion de ces travaux, la pierre tombale de Charles de Percy qui était enterrée au sud de la tour-clocher a été déplacée et présentée en hauteur, devant l’entrée de l’église.

Cette église paroissiale est parfois desservie par un prêtre venant de Vassy (12 km).

Il existe une Association du Patrimoine de Saint-Charles de Percy, créée le 12 janvier 2007[7].

Pour la consolidation du clocher, la Sauvegarde de l’Art français a octroyé en 2010 une somme de 10 000 €.

Louis Le Roc’h Morgère

 

[1] Qui supplante ici ou là les traditionnels saint Roch et saint Sébastien ; il a une statue en pierre à Neuilly-le-Malherbe et une autre en bois peint à Surville (Calvados). Le tableau, classé, du peintre calvadosien Xénophon Hellouin (1820-1895), la Peste de Milan, renvoie à l’épidémie de 1575, où Charles Borromée fit preuve d’un héroïque dévouement.

[2] Statistique monumentale du Calvados, Caen, 1857, t. 3, p. 61. La paroisse fut fondée en 1780 à la demande de Charles de Percy (1711-1782) qui se fit enterrer au pied du clocher.

[3] Et remplacée par trois cloches en 1859 et 1860.

[4] « Autrefois l’humidité du cimetière était telle que dans certaines saisons il était impossible de donner aux fosses la profondeur voulue et que les bières et leur contenu étaient littéralement jetées à l’eau, noyées » (Rapport de l’agent voyer d’arrondissement, 22 mars 1859).

[5] Arch. dép. Calvados, 447 Edt 24/1. Ce dossier ne comporte qu’une seule pièce pour 1858… Il y a malheureusement très peu d’archives sur cette église.

[6] Le financement des travaux (290 000 €) se répartit comme suit : 48 344 € (DRAC), 96 689 € (Conseil général du Calvados), 10 000 € (la réserve parlementaire), 13 660 € (la Fondation du Patrimoine), 10 000 € (La Sauvegarde de l’Art français), 5 000 € (la Fondation Langlois). Est restée à la charge de la commune (182 habitants) la somme de 68 025 €. Bulletin municipal de Saint-Charles-de-Percy, juillet 2010.

[7] Je remercie MM. Lebeurier et Paillard, des Archives du Calvados, et M. Desormeau, maire, pour la visite de l’église.

Le projet en images